Jusqu'où peut tomber l'euro ?
Publié le mardi 17 mars 2015 . 4 min. 24
Xerfi Canal TV présente l'analyse d'Olivier Passet, directeur des synthèses, Xerfi
On ne sait jamais à quel modèle se référer pour prévoir le taux de change. Ce que l’on sait, c’est que nos modèles standards, qui se rapportent aux déséquilibres de paiements, aux écarts de taux, ou aux écarts de prix, sont de très mauvais prédicteurs de fluctuations courtes des parités entre monnaies. La raison on la connaît. La demande de devise n’est plus principalement dictée par les besoins liés aux transactions de biens ou de services. La demande intrinsèque de titres financiers et de monnaie, dictée par les anticipations des acteurs de marchés, a pris le dessus sur les motifs commerciaux ou d’investissement réel. Tout cela est propre à générer ce que l’on appelle du sur-ajustement et de l’instabilité. Et ce n’est pas parce que l’euro aurait retrouvé sa zone de confort pour les exportateurs du continent à 1,20 ou 1,10, que sa baisse va nécessairement s’arrêter là.
Si nous avions il y a 6 mois évoqué la possibilité d’un retour à la parité 1 pour 1 entre euro et dollar, ce n’était pas sur la base d’un modèle meilleurs et encore moins plus précis qu’un autre. Nous avions juste pris en compte les quelques rares régularités qui caractérisent l’évolution du change.
1/ Le taux de change connaît des fluctuations longues autour de ce que l’on appelle la parité de pouvoir d’achat. C’est-à-dire qu’il s’enroule à très long terme autour de la parité qui égalise les prix entre deux régions. C’est un point de référence très grossier,mais qui nous dit que les écarts de coûts et de productivité qui sous-tendent la formation des prix entre deux régions, finissent par jouer comme force de rappel. Or cette référence des PPA varie lentement. Et c’est sur cette base que l’on estime aujourd’hui que pour la France, le niveau de confort de l’euro est voisin de 1,15, tandis qu’il se situe à 1,25 côté allemand.
2/ Ces fluctuations forment de grands cycles. Il existe de longues phases d’appréciation suivies de longues phases de dépréciation centrées autour de la PPA. Et c’est au nom de ces grands cycles, que nous avions évoqué la possibilité d’un retour à 1 pour 1.
Pourquoi avons-nous prédit ensuite que le début de dépréciation de l’euro qui se dessinait mi 2014 s’inscrivait probablement dans un de ces grands cycles ? Pour 3 raisons principales :
D’abord parce que nous constations que la précédente grande phase de dépréciation de l’euro à partir de 1996-1997 avaient été le produit d’un très fort décalage conjoncturel de la zone euro par rapport aux Etats-Unis. Et c’est bien le cas aujourd’hui.
Ensuite, parce que cette précédente vague de baisse s’était produite quand la reprise américaine avait besoin de l’embellie des autres. Et c’est à nouveau le cas aujourd’hui. La FED a intérêt à éliminer le risque de déflation européenne.
Enfin, parce les rendements anticipés sur les actifs américains étaient alors orientés à la hausse. C’est bien ce que promet la fin du Quantitative Easing de la FED. Encore faut-il que ce resserrement ne fragilise pas les marchés d’action. Et là encore, les niveaux de profitabilité observés outre-Atlantique ainsi que les promesses des secteurs à haute technologie, fantasmées ou non, incitent à l’optimisme.
Bref, les conditions de 1996-1997 semblent reproduites. Cela ne fait pas pour autant une prévision et encore moins une prévision précise. Cette analogie nous donne juste deux indications.
• Premièrement, la baisse de l’euro et son maintien sous sa PPA peut s’inscrire dans la durée, de l’ordre de 5 ans si l’on se réfère par exemple au cycle des années 90-2000. Cette durée va dépendre de la capacité de l’économie américaine à encaisser la revalorisation du dollar. Nous supposons pour l’instant que l’économie US a cette capacité, mais seule l’épreuve des faits nous dira ce qu’il en est.
• Deuxièmement, les séries longues indiquent que les parités oscillent de 20 à 30% au-dessus ou en dessous de leur PPA. Cela veut dire que l’euro peut briser le plancher des 1, mais pas beaucoup plus. A 0,8, il serait déjà 35% inférieur à sa parité de pouvoir d’achat.
Olivier Passet, Jusqu'où peut tomber l'euro ?, une vidéo Xerfi Canal TV
Les dernières vidéos
Europe, zone euro
Les dernières vidéos
d'Olivier Passet
LES + RÉCENTES
LES INCONTOURNABLES