Xerfi Canal TV a reçu Philippe-Quentin Réal, vice-Président Secteur Public chez CGI Business Consulting pour évoquer les possibilités qu’offre le numérique en matière de sécurité dans le transport aérien. Le dernier évènement en la matière, c’est la mise en place du PNR (Passengers Name Record) en Europe.
Pouvez-vous nous en rappeler les objectifs ?
Pour l’Etat, l’objectif premier du PNR, c’est d’utiliser tout le potentiel de la donnée pour être en mesure de mieux cibler en amont les risques en matière de terrorisme et de trafic en tout genre. Mais ces données peuvent aussi servir, en aval, d’appui aux forces opérationnelles (douanes, police, renseignement, etc…) quand elles recherchent quelqu’un. Il est important de rappeler qu’une directive européenne dont le vote devrait intervenir à court terme oblige désormais les Etats-membres de l’Union à se doter d’un dispositif PNR. Il faut bien dire qu’avant cela, certains pays trainaient franchement des pieds. En ce sens, les attentats de novembre 2015 ont précipité les choses. Le PNR a à présent vocation à devenir opérationnel dès la fin de l’année 2016.
Mais que contient concrètement ce PNR ?
Eh bien il compile les données recueillies par les compagnies aériennes à la fois au moment de la réservation et au moment de l’embarquement des passagers : nom, date de naissance, trajet et historique des trajets, poids des bagages, etc… L’intérêt de cette collecte d’informations est multiple. D’abord, on peut croiser les données dès réception avec des fichiers de police ou de renseignement qui existent déjà, par exemple le fichier dit FPR Fichier des Personnes Recherchées. C’est ce que l’on appelle le criblage. Le second intérêt, c’est le ciblage : on ne cherche pas une personne en particulier mais on peut enclencher une surveillance accrue sur des profils qui présentent des caractéristiques particulières susceptibles de présenter des risques. Et puis, pour les enquêtes, le PNR peut fournir des éléments précieux comme par exemple l’historique des déplacements d’une personne suspectée.
Comment ce PNR est-il accueilli du côté des compagnies aériennes ?
Il faut bien l’admettre, c’est une contrainte pour elles. Surtout qu’à l’heure actuelle, elles passent souvent par des prestataires tiers pour recueillir et exploiter cette donnée. C’est pourquoi elles demandent une harmonisation des plateformes pour limiter un coût d’exploitation déjà conséquent. Autre problème pour les compagnies aériennes : elles peuvent se retrouver tiraillées entre un pays qui ne souhaite pas la transmission des données de ses ressortissants et un autre qui exige qu’elle les lui donne. Cela fait partie des grandes problématiques à régler. Enfin, elles veillent tout particulièrement à ce que ça ne ralentisse pas la fluidité pour les passagers. Les contraintes de sécurité dans les aéroports sont déjà assez importantes en l’état pour ne pas rajouter de nouvelles contraintes !
Justement, côté passager, qu’est-ce que le PNR change ?
L’objectif est que le dispositif soit transparent pour le passager. Mais ça pose bien évidemment des difficultés. Je pense notamment aux questions soulevées en matière de libertés individuelles qui ont ralenti l’adoption de tels dispositifs ces dernières années. Il y a eu certaines garanties sous l’impulsion de l’UE et de la CNIL en France. Par exemple, les données sur le régime alimentaire des passagers ne peuvent être transmises aux autorités et plus généralement la durée de conservation des données ou leur accès direct par les forces de police ont été limitées. Mais l’équilibre entre un système de fichage de grande ampleur et le nécessaire besoin de sécurité reste une préoccupation constante des citoyens.
On a compris qu’il restait beaucoup de choses à régler… Mais quelles sont les perspectives que l’on peut d’ores et déjà identifier pour les toutes prochaines années ?
Eh bien déjà, pour positiver un peu, le flux passager dans les aéroports devrait s’améliorer. L’objectif du PNR est de mieux cibler les contrôles. Les forces de l’ordre vont donc optimiser leur travail et rendre les contrôles moins systématiques. Et puis, pour aller plus loin, le PNR va permettre de plus en plus de choses car plus il y aura de données, plus l’on pourra faire de recroisements. On pourra aussi étendre ce dispositif aux autres moyens de transport, train ou bateau, comme ce qui se fait déjà aujourd’hui dans le transport de marchandises. Les perspectives sont immenses.
Philippe-Quentin Réal, Numérique et sécurité dans le transport aérien, une vidéo Xerfi Canal TV
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Publié le mardi 03 mai 2016 . 5 min. 59
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