Xerfi Canal présente l'analyse d'Alexandre Mirlicourtois, directeur de la prévision et de la conjoncture de Xerfi
Le pétrole, c’est cher, et le niveau des prix est durablement stable à haut niveau. Voilà un an, c’était gravé dans le marbre de la plupart des scénarios. Un diagnostic rigoureux, étayé par les meilleurs experts en économie et géopolitique, après avoir analysé toutes les variables déterminantes du marché. Et tout s’est passé comme prévu jusqu’au début de l’été. Et là, patatras : la tendance s’est brutalement retournée au point que le mouvement est devenu incontrôlable à partir d’octobre. Le prix a chuté jusqu’à crever le plancher des 60$ le baril. Et une expression oubliée refait surface : celle de contre-choc pétrolier. Un retournement que personne n’avait vu venir et qui provoque un électrochoc sur l’économie mondiale. Deuxième certitude, deuxième contre-pied : la croissance ne reviendra en zone euro que tirée par la merveilleuse locomotive allemande. Le hic, c’est que la machine est tombée en panne. Là encore, le début d’année a été conforme aux prévisions. L’Allemagne triomphante surfait encore sur un rythme de plus de 3% de croissance au premier trimestre, avec certes des conditions météorologiques exceptionnelles. La correction est venue au second trimestre. Le problème, c’est que depuis l’Allemagne fait du surplace, passant même à un cheveu de la récession cet été. De fait, 2014 aura révélé l’impasse de l’économie allemande qui a mangé son pain blanc, la faute à un marché intérieur atone avec une population vieillissante ; la faute à une demande européenne affaiblie par les politiques d’austérité et la concurrence allemande ; la faute au ralentissement des pays émergents et surtout de la Chine. Troisième grande surprise, la déroute de la Russie. Certes, on connaissait son talon d’Achille : sa trop forte dépendance à la rente énergétique. On voyait bien les sanctions internationales à la suite des événements en Ukraine. Mais de là à prévoir le dévissage de près de 55% du rouble face au dollar en à peine 6 mois, de là à prédire des taux directeur qui grimpent brutalement de 10,5% à 17% à mi-décembre, de là à envisager à envisager une sévère récession de -4% pour 2015 ! Non, personne n’avait imaginé ce scénario. La BCE, via son président Mario Draghi, a elle aussi créé la quatrième grande surprise de cette année folle en brisant trois tabous : premier tabou, celui du risque de déflation en zone euro, enfin admis et désigné par son nom. Second tabou, la surévaluation de l’euro. Troisième tabou, les excès de la rigueur budgétaire en zone euro. Les trois grands temples de l’orthodoxie que sont la BCE, le FMI et l’OCDE ont tiré le signal d’alarme. Du jamais vu. Avec à la clé, une décrue de l’euro sous bénédiction américaine après la conférence de Jackson-Hole. Cinquième et dernier élément, la disparition totale de l’inflation en France. Certes, une modeste hausse des prix était prédictible. Mais la baisse des prix a surpris par sa brutalité en fin d’année. Avec 0,3% il reste un mince filet de progression des prix. Et encore grâce à la hausse de la TVA. Mais pour l’inflation sous-jacente, celle qui exclut la composante la plus instable (les produits frais et le pétrole notamment), c’est la chute en zone négative. Et encore, en enlevant les prix administrés, ce serait encore pire. Les entreprises industrielles et de services aux entreprises le savent bien, qui ont enduré toute l’année la baisse des prix. C’est du jamais vu depuis 1990, date de création de l‘indicateur. Oui, en 2014 nous attendions une année molle, et au final nous avons eu une année folle.
Alexandre Mirlicourtois, 2014 : de l'année molle à l'année folle, une vidéo Xerfi Canal
Publié le lundi 22 décembre 2014 . 4 min. 03
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