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La France se vante d'une production électrique parmi les plus décarbonées au monde. Mais qu'en est-il vraiment de son industrie manufacturière ? Est-elle aussi verte qu’elle le prétend ? La réponse n’est pas aussi tranchée qu’il n’y paraît. Finalement, que ce soit l’État français, par le tribunal de Paris, ou l’Allemagne, par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, les tribunaux ont jugé en 2021 comme insuffisante l’action climatique des deux pays. L'industrie française stricto sensu serait toutefois plus carbonée que celle de son voisin allemand. C'est étonnant, mais c’est de prime abord le constat de l'étude de David Lolo, « L'industrie est-elle plus verte ailleurs : la France face à l'Allemagne », publiée par la Fabrique de l’industrie. L’ouvrage révèle qu'en 2021, l'industrie manufacturière française a émis environ un tiers de plus de gaz à effet de serre, les fameux GES, que son homologue allemande. Ce constat brut est néanmoins nuancé par l’auteur.


Le GHG Protocol et les scopes : des outils de mesure essentiels


Avant d’aller plus loin, il est utile d’apporter des précisions sur le vocabulaire utilisé dans l’étude. Il est notamment fait référence au GHG Protocol, que l'on peut traduire en français par protocole des gaz à effet de serre. Ce protocole international vise à établir un cadre réglementaire pour mieux définir les émissions de gaz à effet de serre, en particulier celles issues de l'industrie. Autre notion clé : le Scope. Derrière ce mot énigmatique se cache une classification utilisée pour évaluer les émissions de gaz à effet de serre dans le cadre d’un bilan carbone. Encadrés par le GHG Protocol, les scopes permettent d’évaluer et de catégoriser les GES émis. On retrouve trois niveaux de scopes, dont deux sont repris par l’auteur : le Scope 1 correspond aux émissions de gaz à effet de serre directement émises par les activités industrielles ; le Scope 2 couvre, quant à lui, les émissions de GES indirects résultant de la production d'énergie achetée et consommée par les industriels, notamment l’électricité.


Un bilan nuancé par des effets de structure


Les industriels allemands sont globalement plus verts au niveau du Scope 1. Ils sont plus vertueux, mais finalement pas tant que ça. Deux éléments sont à prendre en compte. Le premier, les effets de structure : un tissu industriel dont les activités intensives en carbone sont surreprésentées affiche, toutes choses égales par ailleurs, un plus mauvais bilan carbone. C’est le cas de la France. Le second facteur est le niveau de gamme : une industrie mieux positionnée sur le haut de gamme dégage plus de valeur ajoutée sans forcément produire plus de CO2, ce qui fait baisser son intensité carbone. C’est le cas de l’Allemagne. Ainsi redressé, l’écart entre les deux pays apparaît comme beaucoup plus mince qu’initialement.


Le mix énergétique, atout majeur de la France


Au niveau du Scope 2, les industriels français bénéficient d’un énorme privilège : celui du mix énergétique de la France, beaucoup moins carboné que celui de l’Allemagne, dont la production d’électricité dépend encore en grande partie du charbon. L’intégration du Scope 2 dans le bilan carbone annule l’écart originellement observé, voire l'inverse entre les deux pays. L’auteur précise que la France peut jouir encore pour quelques années de son électricité décarbonée comme d’un avantage comparatif.


Cela n’absout pas pour autant les industriels de faire des efforts en matière de décarbonation. L'horizon 2045, avec pour objectif la neutralité carbone, n'est pas une simple ambition, mais une nécessité vitale pour maintenir la compétitivité de l'industrie française tout en répondant aux exigences écologiques de notre époque.


Publié le vendredi 18 octobre 2024 . 3 min. 43

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