Xerfi Canal présente l'analyse d'Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi
Les prix de l'immobilier peuvent-ils craquer dans les beaux quartiers, à Paris et dans les villes et régions les plus prisées ? C'est vrai, le marché français présente dans son ensemble tous les symptômes d'une bulle :
1- les prix sont historiquement élevés
2- ils sont déconnectés de l'évolution des revenus des accédants et des loyers
3- l'emballement a été très rapide ces dernières années
4- ces hausses se sont accompagnées d'un gonflement du crédit
Pour se convaincre de la bulle, un seul indicateur suffit : celui du rapport entre le prix d'un logement et le revenu annuel des ménages pour calculer le nombre d'années nécessaires pour l'acquérir : sur longue période, il faut en moyenne 2,8 années de revenus. Avec le taux d'épargne actuel de 16%, cela représente 17 ans et demi d'économies. Sauf qu'il y a bien longtemps que la moyenne est dépassée. Aujourd'hui, il faut 4,4 années de revenus, soit près de 28 ans d'économie. C'est toute une vie d'épargne. C'est hors norme ! Un simple retour dans le couloir des fluctuations entraîneraient une chute des prix de 23%, revenir à la moyenne et c'est une chute de 35%. Alors en effet pourquoi ne pas le prévoir. A court terme, parce que les données des Notaires n'indiquent rien de tel tout simplement. Au 3ème trimestre, les prix ont reculé de 0,2% en moyenne en France métropolitaine, avec un écart négligeable entre la province en repli de 0,1% et l'Ile-de-France en recul de 0,3%. A Paris stricto sensu, ils baissent de 0,5%. Des corrections infimes qui s'inscrivent parfaitement dans notre scénario d'une décélération ad minima des prix de l'immobilier. Alors pourquoi les prix s'ajustent aussi peu ?
Fondamentalement, les prix résistent parce que les jeunes générations entrent dans le jeu de la bulle. Dans l'immobilier, le rendement est conditionné par les plus-values que chaque génération d'acheteurs espère réaliser à sa sortie du marché. Chaque génération se repasse la patate chaude. Mais comme les anticipations de prix sont en hausse et les conditions de crédits encore accessibles, le flux de nouveaux entrants suffit pour empêcher l'éclatement de la bulle. En fait, seule une remontée très brutale des taux d'intérêt et l'assèchement du crédit gripperait la machine. Ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Les taux d'abord. La fin de 2013 et les premiers mois de 2014 devraient rester favorables à des taux de prêts immobiliers toujours très bas. Bien sûr, ils resteront dépendants de l'évolution des OAT 10 ans, la référence des banques pour fixer les taux accordés aux particuliers. Mais, comme la dégradation de la note souveraine de la France par Standard & Poor's en novembre n'a eu aucun effet sur les marchés financiers, le scénario d'une hausse ne s'envisage donc pas pour l'instant. Quant à la distribution de crédits nouveaux, mesurée par les flux nouveaux mensuels ou en cumul sur 12 mois à 127 milliards d'euros fin septembre, elle emprunte la même direction. Elle est sur une pente ascendante qui devrait porter le bilan annuel à 140 milliards d'euros. Un excellent millésime, même s'il faut y mettre un bémol : ce bond s'explique en grande partie par l'explosion des demandes de renégociations. Ce qui n'alimente donc pas le marché. A court terme, notre scénario à Xerfi écarte tout ajustement brutal des prix. La correction en 2013, sera donc minime avec un recul de 1,7%. Paris fera un peu moins ben avec -2,3%. Pour 2014, les écarts devraient se resserrer avec une prévision de -0,5% pour l'ensemble du territoire et de -0,8% pour Paris. La conclusion s'impose : la bulle à la peau dure.
Alexandre Mirlicourtois, La bulle immobilière des beaux quartiers va-t-elle éclater ?, une vidéo Xerfi Canal
Publié le jeudi 05 décembre 2013 . 3 min. 59
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