La crise du logement va se durcir
Publié le mardi 28 mai 2013 . 4 min. 13
Xerfi Canal présente l'analyse d'Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi
C'est une situation de taux idéale pour les acheteurs depuis début janvier. Et 2013 s'annonce exceptionnelle à tout point de vue.
D'abord, le taux directeur de la BCE, qui commande les prêts immobilier à taux variables, a été abaissé à 0,5% début mai. C'est son plancher historique et les perspectives sont baissières. Cette réduction exceptionnelle du coût des ressources pour les banques se conjugue à un climat de concurrence féroce entre les établissements financiers. Cette concurrence est d'ailleurs exacerbée par le fait que les OAT rapportent aujourd'hui moins de 2%. A environ 3% en moyenne, selon l'Observatoire du Financement des Marchés Résidentiels, les taux de crédit immobilier entrent dans la légende, du jamais vu depuis 1947.
Pour une fois, la moyenne a du sens puisque plus de 97% de la production de nouveaux crédits s'effectue à des taux inférieurs à 4%. Reste à savoir si les conditions de crédits actuelles peuvent, à elles seules, relancer la dynamique du marché de la construction neuve malgré l'envolée du chômage, le recul du pouvoir d'achat et les coups de canifs aux aides publiques. La réponse donnée par l'évolution des mises en chantier sur un an est ambigüe. C'est la fin de la dégringolade, mais aucun redressement n'apparaît clairement. Au mieux, on a le sentiment que le point bas de la dégradation est passé.
Pour affiner le diagnostic, il faut regarder de plus près les résultats de la promotion immobilière. Certes, la profession est à l'origine d'un tiers seulement des mises en chantier en moyenne, mais elle bâtit sa stratégie sur une vision longue et une connaissance fine du marché. Selon les données de la Fédération des promoteurs immobiliers de France, les ventes nettes au premier trimestre ont décroché de 6,9% sur un an, signe que le marché n'est pas complètement guéri et que la situation reste préoccupante. Mais ce sont les évolutions très différenciées des biens dédiés à la location, et de ceux dédiés à une occupation directe qui sont particulièrement parlantes.
Dans le locatif, le bilan du premier trimestre est catastrophique avec une chute de 23% des ventes. Pour les accédants, le bilan est positif avec une hausse de 4% des ventes. Alors pourquoi un tel écart ? En fait, la chute du segment location c'est-à-dire celui des « investiseurs » s'explique principalement par l'instabilité fiscale. Révision à la baisse du dispositif Scellier en 2012, remplacé en 2013 par le Duflot, moins avantageux, durcissement de la fiscalité sur les plus-values immobilières hors résidences principales : la coupe est pleine. Et les investisseurs ont d'autant plus fui le marché que les placements alternatifs, notamment en actions, reprenaient quelques couleurs. A l'opposé, la légère hausse des ventes en accession accrédite l'hypothèse de la relative sensibilité de certains ménages aux taux bas. Cela suffira-t-il pour inverser la tendance d'ensemble ? Non, car chez les promoteurs, les ventes aux investisseurs représentent 40 à 50% dans le neuf sur longue période, et 64% avec un dispositif à succès comme le Scellier. L'année 2013 ne sera pas bonne comme attendu. C'est pourquoi, nous maintenons chez Xerfi notre prévision de 326 000 mises en chantier pour l'ensemble de la France, un niveau proche de celui de la précédente période de vache maigre pour les marchés immobiliers : de 1992 à 1998. Conséquence ? La crise du logement va se durcir.
Alexandre Mirlicourtois, La crise du logement va se durcir, une vidéo Xerfi Canal
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