La perte de compétitivité des services devient très inquiétante : les excédents ont été réduits à trois fois rien, sombrant de 25 à 5 milliards d’euros en cinq ans seulement. Comme l’industrie, les services perdent régulièrement des parts de marché à l’extérieur.
Le solde touristique ne chute pas seulement à cause des attentats
Il est tentant de relativiser ces chiffres, car une partie de ce décrochage trouve son explication dans la chute de la ligne "voyage" de la balance des paiements. Représentative de l'évolution du solde du tourisme, les dernières variations ont été affectées par des chocs externes avec la succession des attentats, en 2015 à Paris puis en 2016 à Nice, qui ont dissuadé nombre de visiteurs étrangers de se rendre en France et fait fondre les recettes. Ces évènements dramatiques ont joué, c’est incontestable, mais s’arrêter là serait se voiler la face.
L’amélioration de la compétitivité de l'offre touristique mondiale - principalement celle des pays du Sud de l'Europe - et la multiplication des vacances des Français à l'étranger, sont au cœur même de l’évaporation du solde touristique. Bilan, le solde des voyages n'affiche plus qu'un maigre excédent à peine supérieur à 5 milliards d'euros.
La perte de compétitivité dans le transport est générale
La dégradation de la compétitivité et le manque d'attractivité de l'offre est encore plus visible dans les transports. Le solde est quasiment déficitaire depuis la fin des années 90, et le trou en 2017 aura dépassé les 2 milliards d’euros. C'est la marque d'une double attaque.
La première dans le transport routier de marchandises : le pavillon français a été balayé par ceux d'Europe de l'Est qui ont joué à fond la carte du dumping social. Selon la dernière étude du Conseil national routier, le coût kilométrique d'un conducteur routier à l'international pour un transporteur français est de 43 centimes d'euros. C'est 15 centimes pour un employeur polonais, et 11 pour un Bulgare. Soit un rapport de 1 à 4, c'est imbattable. Cela exclut de fait les entreprises françaises du transport international entre la France et l’Europe, et les met également en difficulté sur leur propre marché.
La seconde attaque a lieu dans le transport aérien, avec le développement du low-cost par des compagnies sous pavillons étrangers : sur les 150 millions de passagers qui décollent ou atterrissent d’un aéroport français chaque année, près d'un sur trois voyage avec une compagnie à bas prix, au plus grand profit des deux géants du secteur : l’anglais EasyJet et l’irlandais Ryanair, qui se partagent à eux seuls 60% du marché low cost.
Plus alarmant : les services aux entreprises sont devenus déficitaires
Autre point noir, le plus alarmant, celui des services aux entreprises. Les excédents ont disparu pour laisser place à un déficit de l’ordre de 5 milliards d'euros. C'est la trace comptable d'un double mouvement : une concurrence mondiale plus intense, et des délocalisations.
Du côté des délocalisations, le mouvement s'étend désormais aux prestations à forte valeur ajoutée comme la R&D ou des fonctions informatiques opérationnelles. Dès lors qu'un service, ou une tâche, peut être automatisé et livrable à distance, alors il y a un risque. La révolution numérique et l'émergence des plateformes importent la concurrence internationale. Les services français sont d'autant plus mal embarqués que les coûts de la main-d'œuvre y sont plus élevés que la moyenne des pays européens. Une prestation haut de gamme en France coûte environ (salaire et charges comprises) 47 euros de l'heure. En Allemagne c'est 41, en Italie 34, et en Espagne c'est moins de 25 euros. En Bulgarie et en en Pologne c'est quatre fois moins, on retrouve les mêmes écarts que dans le transport routier.
Le problème de compétitivité de la France ne se limite pas à l’industrie ou à un cout du travail trop élevé sur la partie non-qualifiée de la main d’œuvre. Le problème est global. Et désormais les services, même hauts de gamme, sont sur la mauvaise pente… Ce qui est bien plus alarmant.
Publié le mercredi 7 février 2018 . 3 min. 57
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