L'écart se creuse entre l'Europe et les États-Unis. Là où l’Europe piétine, les États-Unis foncent. Et si le Vieux Continent décroche, c’est avant tout à cause de son déficit de productivité, lui-même reflet d’un manque d’investissement chronique dans les nouvelles technologies. L’effort d’investissement des entreprises n’est pas en cause ; il est pratiquement le même aux États-Unis et dans la zone euro (entre 12 et 13% du PIB environ). En revanche, la part de cet investissement consacrée aux technologies est presque deux fois plus élevée aux États-Unis (5% du PIB contre 2,8% seulement dans la zone euro). Ce n’est donc pas tant l’effort qu’il faut accentuer, que la nature de l’investissement qu’il faut transformer. Le rapport Draghi est catégorique : l’écart de productivité entre les deux côtés de l’Atlantique est uniquement lié au retard européen dans le secteur de la tech. Les indicateurs les plus synthétiques sont sans appel et signalent en effet un gap technologique grandissant.
Un retard criant en recherche et développement
Tout d’abord, il y a l’effort d’investissement en R&D, où l’Europe est à la traîne des États-Unis, mais aussi de la Chine, sans parler du Japon ou de la Corée du Sud en termes d’intensité de l’effort, avec aujourd’hui un rapport de 1 à 5 de la masse de R&D investie annuellement dans la Tech entre l’UE et les États-Unis. Et c’est avant l’annonce fracassante de Donald Trump d’un investissement de 500 milliards de dollars en infrastructures d’intelligence artificielle. Le décrochage de l’Europe porte ainsi la marque de son sous-investissement dans la guerre technologique.
Le retard est colossal sur toutes les technologies fondamentales qui façonnent le XXIe siècle : intelligence artificielle, semi-conducteurs, 5G, informatique quantique, biotechnologies et énergie verte. Dès que l’on aborde ces domaines sur leur versant offre, l’UE joue en seconde division, dépassée par les titans sino-américains qui surplombent la compétition mondiale. Difficile en outre d’espérer une remontada à court terme. En cause, la concentration des moyens financiers.
Un déséquilibre financier au profit des États-Unis
Côté américain, il y a les superprofits des GAFAM, qui se transforment en super-réserves de cash offrant une puissance de feu incomparable en matière d’investissement et de capacité de rachat des start-ups les plus prometteuses. Une asymétrie qui se prolonge dans l’industrie du capital-risque. Une fois de plus, ce sont les États-Unis, loin devant la Chine, qui concentrent les investissements en matière de développement de l’IA.
Un capital humain en décalage avec les besoins technologiques
Ensuite, il y a les données portant sur le capital humain. En matière de diplômes, l’Europe accuse un retard persistant avec les États-Unis. Cela est vrai lorsque l’on scrute la population de plus de 25 ans dans son ensemble, où le Vieux Continent pâtit de son retard à l’allumage en termes de démocratisation de l’enseignement supérieur, mais cela reste vrai pour les plus jeunes générations. Et c’est peut-être aussi pour cela que l’Europe, utilisatrice massive des nouvelles technologies, ne parvient pas à les convertir en gains de productivité. L’Europe est encore dans une vieille logique de déversement de ses emplois industriels sur des petits jobs de services dégradés à faible valeur ajoutée. Tandis que les États-Unis, autrefois temple de ces emplois, sont maintenant entrés dans une phase d’automatisation et d’optimisation de ces services. Ils ne sont pas seulement producteurs, mais aussi meilleurs utilisateurs des technologies numériques. Il faut craindre que l’Europe soit entraînée dans un cercle vicieux : faiblesse des dépenses d’investissement en nouvelles technologies et de recherche et développement, donc faiblesse des gains de productivité et de la croissance.
Publié le lundi 03 février 2025 . 3 min. 28
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