Xerfi Canal présente l'analyse d'Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi
La déflation est maintenant une donnée. Dans la grande distribution, les prix des produits de grande consommation baissent depuis 1 an maintenant. Le recul atteint 0,8% soit le niveau le plus bas depuis 2006, début du calcul de la série. Et disons le tout de suite : pour casser les prix, il faut écraser les coûts. Conséquence, les enseignes s’organisent pour s’adapter à cette guerre des prix qui s’enracine. Pour faire bref, elles massifient leurs achats pour accroitre encore leur pouvoir de négociation et obtenir toujours plus de réduction de leurs fournisseurs. C’est dans ce cadre qu’il faut replacer les rapprochements des centrales d’achat. D’abord celle d’Auchan et de Système U en septembre dernier. Une alliance pour négocier ensemble les achats des marques internationales et nationales hors produits frais issus de la filière agricole. Un mois après, voilà qu’Intermarché et Casino s’allient à leur tour. On assiste donc à un bouleversement total de l’ordre établi et de la puissance de feu des principales centrales d’achat. Pour mémoire avant les intégrations encours, le duo composé de Carrefour et Leclerc se détachait avec environ 20% de part de marché en valeur début septembre selon les données du panéliste Kantar Worldpanel. Un duo suivi d’un quatuor (Intermarché, Casino, Auchan et Système U) représentant entre 10 et 15% de part de marché chacun, le reste du classement étant essentiellement complété par les hard-discounteurs. Désormais, c’est l’ensemble Intermarché-Casino qui prend la tête avec près de 26% de part de marché. Derrière au coude à coude, Carrefour, une fois que le groupe aura intégré DIA, et le couple formé par Auchan et Système U. Vient ensuite Leclerc qui est légèrement détaché. Ensemble, ces quatre-là c’est près de 90% du marché. Il s’agit donc bien de mener une stratégie fondée sur la domination par les prix et par les coûts. On comprend alors un peu mieux l’émoi pour ne pas dire l’effroi des entreprises de l’agro-alimentaire au moment où s’ouvre la période des négociations entre fournisseurs et distributeurs. La remontée de leur taux de marge entre la mi-2012 et la mi-2013 n’aura été qu’un feu de paille. Et une nouvelle phase de baisse de grande ampleur est commencée, comme ce fut le cas entre 2008 et 2010 après deux ans d’accalmie, comme ce fut le cas entre 2005 et 2006, avec à chaque fois des planchers de plus en plus bas. Le risque, c’est que le nombre de dépôts de bilan reparte à la hausse. D’ailleurs, notre indicateur Xerfi-Risk qui mesure le risque de défaillance, remonte dans l’industrie alimentaire et n’est plus très loin de la barre des 60, frontière qui marque l’entrée dans la zone de risque élevé. Le danger est connu. C'est celui du délitement, voire de la disparition, d'une filière. L’effondrement du textile, de l’habillement, de l’électronique grand public et du petit électroménager est là pour le rappeler. Autre victime collatérale, plus inattendue, le hard-discount. Au fur et à mesure que les petits prix deviennent la norme et non-plus l’exception ses parts de marché s’effilochent. La guerre des prix n’est pas terminée, la liste de ses victimes ne fait que commencée ! Et le piège de la déflation semble se refermer chaque jour un peu plus.
Alexandre Mirlicourtois, Les grands distributeurs écrasent les coûts… et leurs fournisseurs, une vidéo Xerfi Canal
Publié le mardi 21 octobre 2014 . 3 min. 23
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