Raboter, voire supprimer, les crédits d’impôt pour les services à la personne : la tentation est grande pour le gouvernement d’y voir une source d’économies substantielles dans un contexte budgétaire tendu. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Quelles sont les masses en jeu ? Il s’agit d’une liste hétéroclite de 26 services dispensés au domicile du bénéficiaire, regroupant à la fois des prestations courantes (garde d’enfants, soutien scolaire, aides aux personnes âgées, services ménagers, etc.) et d’autres plus spécifiques (comme les services d’un coach sportif). Ces services donnent droit à une réduction d’impôt, sans condition de ressources, égale à 50% des dépenses effectivement supportées, dans la limite d’un plafond de 12 000 euros, éventuellement majoré. Le crédit est déduit de l’impôt dû et, s’il est supérieur, l’excédent est remboursé — en totalité pour les foyers non imposables.
Critiques sur le coût des mesures
Ce dispositif suscite deux types de critiques. La première concerne son coût pour les finances publiques — ou plutôt son explosion. Le coût pour l’État est passé de 2,1 milliards d’euros en 2017 à 6,7 milliards en 2024, soit un triplement en seulement sept ans. Les conclusions de la Cour des comptes sont sans ambiguïté : cette flambée s’explique peu par l’augmentation du volume d’heures rémunérées ou les répercussions de la hausse du SMIC, mais davantage par le renforcement de certains dispositifs de soutien et par la montée en puissance de prestataires plus onéreux. Quant au coût annuel par emploi créé, si on peut regretter qu’il ne soit pas évalué de façon systématique, il a été estimé à 48 000 euros dans une publication de 2016 du Trésor.
Une démocratisation relative
Autre critique récurrente : il faut disposer d’un revenu nettement supérieur au coût horaire de l’emploi domestique pour que le dispositif devienne réellement attractif. En clair, ce sont les ménages les plus aisés qui en bénéficient le plus : les 10% les plus favorisés ont un taux de recours aux services à domicile près de six fois supérieur à celui des plus modestes. Mais ce constat mérite d’être nuancé. Les dernières données disponibles confirment une tendance : les différents dispositifs mis en place ont favorisé le développement des services à domicile, et leur usage s’est étendu. Comme le taux de recours est resté stable en haut et en bas de l’échelle des revenus, ce sont les classes moyennes et intermédiaires qui en bénéficient. Il s’agit donc bien d’une forme de démocratisation.
Risques d’un retour au travail au noir
Enfin, au-delà du débat sur le nombre réel d’emplois créés — difficile à mesurer —, l’effet de « blanchiment » de l’emploi est, lui, avéré. Selon la Dares, la part du travail non déclaré a reculé de 5 points entre 2011 et 2017. Depuis, le coût du travail déclaré s’est rapproché de celui du travail dissimulé grâce au renforcement du soutien public, ce qui laisse penser que la tendance s’est poursuivie. Le risque d’un coup de rabot est donc double : 1/ un retour massif vers le travail au noir ; 2/ la fragilisation d’une filière employant majoritairement des femmes — dans 9 cas sur 10 —, souvent peu diplômées, âgées, à temps partiel, immigrées ou issues de l’immigration, une population déjà précarisée.
Quoi faire ? L’équation est complexe. Le péché originel : avoir mélangé tous les types d’activité du moment que le travail se faisait à domicile. Il faudrait maintenant séparer le bon grain de l’ivraie, le superflu de l’essentiel. Mais aussi limiter l’effet d’aubaine, en réintroduisant l’octroi de ces aides au revenu. Vaste programme.
Publié le mardi 17 juin 2025 . 3 min. 58
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