Alstom et Siemens : quel est le but de cette fusion ? Au-delà des polémiques, il y a une vraie logique à ce rapprochement. Elle concerne l’activité de signalisation ferroviaire qui devient hautement stratégique dans le secteur. Bien plus que la construction de rames ou de motrices. La signalisation est en effet indispensable pour réguler le trafic ferroviaire, augmenter les cadences tout en assurant la sécurité des voyageurs. Il s’agit en plus d’une activité de haute technologie, la plus rentable du ferroviaire. C’est également celle qui apporte des gains de productivité potentiels massifs par l’informatisation ; et l’automatisation du trafic.
Dans ce domaine, Siemens et Alstom comptent déjà une longueur d’avance. Voilà déjà quelques années qu’ils y travaillent : L’Allemand en rachetant l’anglais Invensys en 2013, et le Français en reprenant les activités de signalisation de General Electric en 2014. Ainsi avant même leur fusion, Siemens et Alstom représentaient déjà respectivement 20 %, et 10 % du marché mondial de la signalisation ! Le nouvel ensemble jouera donc un rôle central. Il marginalise au passage le canadien Bombardier, en difficulté depuis plusieurs années, qui va devoir trouver au plus vite une solution, tout comme les autres acteurs mineurs du marché mondial.
Il convient aussi de rappeler que la croissance du matériel roulant est concentrée sur les pays émergents, tandis que les pays avancés, très équipés, sont arrivés à maturité. De fait, la signalisation est un marché plus porteur, car elle concerne aussi bien les pays avancés, qui doivent moderniser les systèmes existants, que les pays émergents qui sont en phase d’équipement.
En s’appuyant sur cette activité, Siemens et Alstom vont aussi distancer l’autre nouveau géant du ferroviaire : le chinois CRRC, qui pèse 30 milliards d’euros de chiffres d’affaires, soit près de deux fois plus que le nouvel ensemble européen. Or, la concurrence du géant chinois ne se fait pas encore sentir sur le segment de la signalisation. Dans ce domaine, les occidentaux et les japonais conservent leur avance technologique. Il ne faut donc pas s’étonner que CRRC se soit rapproché du français Thalès. Ils ont conclu fin 2016 un partenariat pour surmonter les handicaps chinois dans les domaines de pointe de la signalisation. Un pied de nez à Alstom qui a tenté de racheter, en vain, les activités de signalisation de Thalès en 2015.
Vous l’aurez donc compris : la signalisation, c’est l’élément moteur des grandes manœuvres actuelles dans le ferroviaire. Ce qu’il faut bien comprendre enfin, c’est que le nouvel ensemble constitué par Alstom et Siemens est à la tête d’un gigantesque écosystème de fournisseurs, d’équipementiers, de sous-traitants, de distributeurs et autres clients. Un écosystème où la firme pivot détermine les règles du jeu, depuis les normes techniques.
Mathias Thépot, Ferroviaire Alstom-Siemens : le vrai enjeu stratégique, une vidéo Xerfi Canal Economie.
Publié le lundi 16 octobre 2017 . 3 min. 19
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