Finies les "flat tax", il faut que l’impôt redevienne plus progressif ! Ne vous y trompez pas, ce n’est pas une injonction d’économistes anticapitalistes, mais bien au contraire le conseil d’une institution internationale de renom, le Fond Monétaire International, le FMI, qui a lancé cette bombe en octobre dernier. Plusieurs autres rapports récents suggèrent également qu’il serait possible, voire souhaitable, de taxer davantage les plus riches pour réduire les inégalités sans nuire à la croissance économique.
Se référant à plusieurs travaux d’économistes, le FMI constate que du point de vue de la théorie de la fiscalité, les taux marginaux d’imposition de la tranche supérieure des revenus pourraient être nettement plus élevés dans les pays de l’OCDE. Et ce sans provoquer d’effets négatifs sur la croissance. Le FMI va donc à l’encontre de la tendance de ces dernières décennies, qui ont vu les taux d’imposition des hauts revenus diminuer. Jugez plutôt : dans les pays de l’OCDE, le taux moyen des tranches supérieures a baissé de 65% à 32% entre 1981 et 2015. Certes le FMI ne dit pas qu’il faudrait revenir à des niveaux proches de 100% comme cela était le cas en Suède ou au Royaume-Uni lors des Trente Glorieuses, mais il estime qu’il y a de la marge…
Rendre l'impôt plus progressif
En tout état de cause, une plus grande progressivité de l’impôt réduirait les inégalités, à en croire le Rapport mondial sur les inégalités paru en décembre. Il rappelle qu’aux États-Unis, la tranche haute d’imposition sur le revenu a été réduite de 33 points entre le début des années 1970 et 2010. Or, sur la même période, les revenus des 1% les plus riches ont augmenté de près de 10 points... A titre de comparaison, en Suisse, en Espagne ou en Allemagne, des pays où la tranche haute d’imposition a peu évolué, les revenus des 1% les plus riches sont restés quasi stables.
Autre point intéressant : la progressivité de l’impôt ne réduit pas seulement l'inégalité après impôt. Elle la réduit aussi avant, puisqu’elle décourage les dirigeants les mieux rémunérés de capter une part encore plus grande de la richesse créée par leur entreprise.
Et taxer davantage la richesse
Autre élément crucial à prendre en compte : une taxation progressive des revenus du travail doit aller de pair avec une taxation accrue des revenus du capital, qui sont répartis plus inégalement. Sans quoi il sera difficile de protéger la progressivité globale du système de l’impôt sur le revenu. Mais dans une économie mondialisée comme la nôtre, taxer les revenus du capital, c’est évidemment très compliqué…
Une alternative consisterait à taxer davantage la richesse, comme les biens immobiliers, et surtout les successions. Cela pourrait être très utile dans des pays comme la Chine, l’Inde, la Russie ou le Brésil, hyper peuplés et très inégalitaires, et où il n’y a quasiment pas de taxe sur l’héritage.
Une révolution, ou… un simple retour aux Trente Glorieuses
Mais évidemment, sur le plan politique, créer une fiscalité plus distributive sera difficile à mettre en œuvre. Pour ce faire, c’est une véritable révolution des mentalités qu’il faudrait opérer. De la même ampleur que la révolution de la pensée économique menée avec succès par Ronald Reagan et Margareth Thatcher à partir des années 1980. Celle-là même qui a sapé les bases du consentement à l’impôt.
Pourtant, rappelons que pendant les Trente Glorieuses, des années 50 à 70, la tranche supérieure d’imposition sur le revenu était par exemple de 94% aux Etats Unis et de 98% en Grande Bretagne. Des niveaux élevés qui ne choquaient ni les décideurs, ni l'opinion publique, et qui n’ont pas entravé la croissance économique, loin de là ! Bref, stimuler la croissance en réduisant les inégalités par l’impôt, voilà une vieille idée qui a peut-être de l’avenir.
Publié le mardi 27 février 2018 . 3 min. 58
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