Xerfi Canal présente l'analyse d'Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi
La France se réforme à flux continue sans jamais se réformer, comme s'il existait un concours entre ministres pour laisser son nom à une loi : plan pour l'innovation, loi sur l'économie sociale et solidaire, loi sur la consommation, plans de reconquête industrielle, « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi », loi de sécurisation de l'emploi etc? Les dispositifs tombent en cascade et s'emboitent à chaque symptôme du malade France. Mais cet activisme permet surtout d'éviter de faire les quelques grandes réformes sur laquelle la France est attendue depuis des années.
Ces réformes quelles sont-elles ? C'est la fameuse mise-à-plat de notre mille-feuille fiscal, c'est le déverrouillage des professions réglementées, c'est la réforme du contrat de travail, c'est la réforme des régimes spéciaux des retraites, c'est le redimensionnement de l'Etat et des niveaux d'administration. Celles-ci ne sont jamais au menu et deviennent le symbole de notre incurie. Alors pourquoi tant de velléité ?
1. D'abord, parce qu'il y a un temps pour les réformes systémiques. Pour qu'elles soient acceptées, elles doivent indemniser les perdants et se situer dans un contexte de croissance qui absorbe les pertes. Or nous les abordons en France toujours au pire moment.
2. Ensuite, parce que la légitimité démocratique de ces réformes est faible. Ces grandes réformes sont voulues et livrées sans mode d'emploi par la démocratie des experts. L'OCDE, La Commission, quelques universitaires. Une petite caste protégée par l'emploi vie, voire exemptée d'impôts au sein d'institutions internationales, et toujours prompte à insécuriser le reste de la société. L'effet est nécessairement désastreux.
3. Parce que le contenu doctrinal de ces réformes est très élevé, et leur assise empirique beaucoup plus fragile.
4. Parce que souvent énoncées de façon radicale, elles aboutiraient à des choix sociétaux auxquels on ne peut adhérer, prenons le cas des taxis, des coiffeurs. On peut certes libéraliser la profession et laisser tous les chômeurs s'engouffrer dans ce type de métier. Mais c'est aussi déclasser ces métiers et régler la question du chômage par le développement d'un lumpenprolétariat sous rémunéré. C'est réformes ne peuvent être que dosées. Idem pour les pharmaciens. La marchandisation du médicament comporte aussi ses dérives.
5. Parce qu'une idée simple peut être redoutable dans sa mise ?uvre. En termes de conflictualité. Mais aussi du strict point de vue technique. On le voit avec la fusion CSG / IR. Fusionner, c'est généraliser la retenue à la source, très bien, mais c'est surtout payer l'impôt sur le revenu présent. C'est l'individualiser, c'est remettre en cause le quotient familial, c'est en définitive tout détricoter, y compris ce qui fonctionne.
En définitive, La véritable urgence en France est de cesser la fuite en avant dans les réformes. C'est peut-être même de supprimer ce terme de notre vocabulaire. Pour lui préférer une action de longue haleine de simplification, de consolidation des dispositifs en surnombre. Travailler la lisibilité pour redécouvrir ce qui fait sens et qui parfois fonctionne mieux qu'on ne le croît. Produire les même effets avec moins de moyens serait déjà une grande conquête et un préalable indispensable à une action réformatrice, car en l'état des choses, notre paralysie vient d'abord du fait que plus personne ne sait ce qu'il a à perdre ou à gagner.
Olivier Passet, Ces réformes incontournables que l'on ne fait jamais, une vidéo Xerfi Canal
Publié le jeudi 28 novembre 2013 . 3 min. 45
Mots clés :
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