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Xerfi Canal TV présente l'analyse d'Olivier Passet, directeur des synthèses - Xerfi

 

Quel bilan peut-on porter sur l’action d’Emmanuel Macron après bientôt deux ans à la tête du ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique ? C’est ne le cachons pas, celui d’une action contrariée par les arbitrages interministériels et parlementaires. Si l’on s’en tient à la surface médiatique des choses, c’est d’abord la loi Macron, bien sûr, objet législatif volumineux, mais qui peut donner le sentiment d’avoir accouché d’une souris. Avec le bilan bien tangible mais parfois raillé des 1500 emplois créés dans le secteur des autocars. Avec une facilité accrue d’installation des notaires. Quelques éléments d’assouplissement du droit du travail. Avec la possibilité circonscrite d’ouverture le dimanche qui peine à être concrétisée dans le cadre de la négociation. Au final, cette loi à forte charge symbolique a moins pour effet de déverrouiller l’économie que la gauche elle-même.

 

A l’actif aussi du ministre, un suivi et une évaluation assez scrupuleuse de l’état d’avancement de sa loi, qui répond à des critiques que le ministre avait formulées par le passé : « les lois sont trop souvent inappliquées par défaut de décret d’application, leur efficacité quasi jamais mesurée… etc. Et c’est avec le même esprit qu’il a accompagné, rationalisé et mis en musique les projets industriels initiés par son prédécesseur.  Il y a la une volonté de ne pas abandonner les projets en ras campagne qu’il faut saluer.

 

Et puis à côté ou en prolongement de la loi Macron, il y a toute une activité législative, à plus faible visibilité : en faveur de de la simplification du droit des affaires, de la commande publique ; du capital investissement,  du numérique, qui met en musique le credo du ministre : la transformation numérique est une révolution globale qui touche toutes les dimensions de l’activité économique : des techniques aux usages, des TPE aux grands groupes en passant par l’Etat.

 

Il y a enfin une série de prises de position qui permettent d’esquisser « la doctrine » Macron :

 

1/ Une volonté de recentrage de l’État, de reflux de la dépense sans pour autant être un adepte de la rigueur, ce qui implique une baisse de la pression fiscale.

 

2/ Une volonté aussi de retisser le lien européen autour de son dénominateur commun : l’économie sociale de marché. Avec un message constant sur la scène européenne que l’on pourrait résumer ainsi : oui aux réformes, mais non à la rigueur et oui surtout aux transferts.

 

3/ Le refus d’un libéralisme offert, passif : sans être colbertiste E. Macron est ferme sur le fait que l’État doit faire entendre sa voix d’actionnaire pour préserver le contrôle hexagonal sur les entreprises stratégiques. En témoignent le doublement des voies de l’Etat, les bras de fer avec Carlos Ghosn, la recapitalisation d’EDF etc.  Il est de ce point de vue proche de la pratique libérale pragmatique anglosaxonne,  où la nationalisation n’est pas taboue (comme dans le cas de GM ou des banques anglaises) lorsqu’il s’agit de préserver les intérêts nationaux. Gouverner le marché, avec les armes du marché, en somme.

 

Autre dimension sur laquelle il se démarque de façon discrète mais constante. C’est son attachement à la mobilité des hommes : l’immigration comme source de création de richesse, donc de croissance et de financement de nos régimes sociaux. Cela était déjà bien palpable dans le rapport Attali avec la préconisation d’une délivrance souple des visas. C’est cette même note qu’il a faite entendre au plus fort de la crise des migrants, au moment où les Etats européens y compris la France se raidissaient sur l’enjeu sécuritaire.

 

Le grand projet Macron, qui aurait pu trouver forme dans la loi Macron II, n’a néanmoins jamais vu le jour. On peut supputer que son ambition était d’encastrer la réforme du marché du travail dans un projet plus large d’adaptation à la transition numérique de nos économies. Le saucissonnage du projet en différentes loi, en a cassé la portée systémique.

 

Là est le principal échec d’Emmanuel Macron. Sa volonté de faire autre chose, de se départir des concepts, des catégories intellectuelles d’un autre temps n’a pas pris corps. Celui qui veut incarner le logiciel d’un nouveau capitalisme de l’après 2008, hors clivages, n’en reste qu’au stade de l’intention. Et l’on ne sait toujours pas à ce stade si la petite musique Macron n’est qu’une mince couche de vernie qui enrobe un conformisme fait du copier-coller des préconisations qui remplissent les tiroirs des ministères et des institutions internationales depuis plus de 20 ans, un invariant que l’on ressert avant comme après 2008, ou s’il s’agit d’une vraie démarche d’innovation politique.

 

Olivier Passet, Du bilan ministeriel à la doctrine MACRON, une vidéo Xerfi Canal TV


Publié le jeudi 21 juillet 2016 . 5 min. 01

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