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Taux de chômage à 7 % à horizon 2022, puis cible de plein emploi à horizon 2025. C’est l’objectif présidentiel. Les français sont habitués aux fausses promesses en la matière depuis 40 ans. Autant dire qu’ils sont échaudés, et qu’ils n’accordent que très peu de crédit à ce type de déclaration. L’objectif est pourtant beaucoup moins héroïque qu’il n’y paraît. Car deux éléments ont changé en profondeur sur le marché du travail depuis quelques années.


Stagnation de la population en âge de travailler


Le premier élément de rupture, c’est l’accroissement de la population en âge de travailler. Cette population de 15-65 ou 20-65 ans stagne ou s’érode depuis 2010, quand elle augmentait encore de 200 à 300 000 par an entre 2000 et 2008. Cette tranche d’âge de population joue un rôle décisif dans la formation de l’offre de travail et la tendance à la stagnation va s’inscrire dans la durée. Ainsi aujourd’hui, à taux d’activité constant, la stagnation de l’emploi ne fait plus ou quasiment plus augmenter le chômage en valeur absolue. C’est une rupture considérable du point de vue strictement comptable par rapport aux décennies passées. Alors certes, le taux d’activité varie. L’offre de main-d’œuvre peut ainsi augmenter à population en âge de travailler constante, soit notamment parce que la durée d’activité des seniors s’accroît. Soit aussi, parce qu’il existe ce que l’on appelle un « effet de flexion des taux d’activité » : c’est le fait que les candidats à l’embauche augmentent lorsque le marché du travail retrouve un certain dynamisme. François Hollande en a fait les frais en 2012 et 2013 avec l’impact de l’allongement de la durée d’activité lié à la réforme des retraites de 2010, qui a porté à 62 ans l’âge de départ. Et le nombre des actifs augmente aujourd’hui avec le réveil des embauches depuis 2015, l’effet étant transitoire. Néanmoins, en régime de croisière, il est clair que la hausse de la population active est bien moindre aujourd’hui qu’hier. Et cela pour longtemps compte tenu de l’arrière-plan démographique. En période de croissance, il faut aujourd’hui moins de 100 000 créations d’emplois pour diminuer le nombre de chômeurs, quand il en fallait 200 à 300 000 dans les années 2000.


Évolution du lien entre croissance et emploi


Le second élément de rupture, c’est le lien entre croissance et emploi. La job machine repart en France à partir du seuil de 1% de croissance. Ce seuil était plus proche de 1,5%-2%, il y a 10 ans. Cela, on peut le visualiser de façon fruste à travers le rythme de productivité tendanciel au plan macro qui indique aussi le seuil de croissance, à partir duquel doit augmenter le volume de travail pour accompagner le surcroît de croissance. Et c’est bien ce que l’on constate aujourd’hui, où la France continue à créer de l’emploi, alors même que la croissance navigue sous un rythme de 1,1% en moyenne depuis 5 trimestres. Cette évolution, on la constate partout dans le monde développé. Le contenu en emploi de la croissance s’est accru, réformes ou non réformes. Avec le numérique, avec le vieillissement et la problématique de la dépendance, on assiste à une explosion des petits emplois de service et de logistique, à faible productivité.


Bref, les choses ont changé. Et annoncer 7% de chômage à horizon 2022, puis de l’ordre de 5% à horizon 2025, c’est simplement parier sur l’absence d’accident conjoncturel majeur à moyen terme. C’est miser finalement sur une croissance moyenne proche de 1,5%. Rien d’exceptionnel. La France est simplement en train de se germaniser. Et pour la première fois, depuis 40 ans, la démographie va finalement faire le job dont les politiques s’attribueront les mérites.


Publié le mardi 21 mai 2019 . 4 min. 09

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