Le coût du travail a-t-il vraiment augmenté plus vite en France que dans le reste de la zone euro. Pour y voir clair, Xerfi a déchiffré l’évolution de l’indice du coût du travail, l’ICT.
C’est une mesure du coût horaire de la main d’œuvre salariée qui prend en compte les salaires et toutes les charges sociales et fiscales attenantes, desquels sont déduites les subventions L’ICT de la France a ensuite été comparé à celui de la zone euro. La lecture est simple : quand la courbe baisse, le cout du travail français s’allège face à ses partenaires. Il s’alourdit quand cette courbe remonte. Jusqu’au milieu des années 90, la France était au même niveau que le reste de l’Europe et ne souffrait d’aucun handicap particulier. La situation se dégrade nettement à partir de 1999 et jusqu’en 2008. On peut certes évoquer le passage aux 35 heures en France, puisque la baisse de la durée du travail s’est faite sans perte de salaire. Elle a donc mécaniquement majoré le coût horaire. Mais l’argument est un peu court : d’abord parce que la hausse a été en partie amortie par plusieurs compensations (réduction des charges, flexibilisation du temps de travail notamment). Mais aussi, parce que l’on constate une dérive qui s’accélère encore après 2003. Et c’est outre-Rhin qu’il faut regarder, avec la politique Schröder et son agenda 2010. L’Allemagne, cet « homme malade de l'Europe » met alors les bouchées doubles pour restaurer sa compétitivité, ébranlée par le choc de la réunification et une entrée dans l’euro avec un Deutsche Mark fort. La flambée apparente des coûts français s’explique totalement par le serrage de vis d’un seul pays, mais pas n’importe lequel, puisqu’il s’agit de la première économie d’Europe, et de loin la première industrie. Pourtant, la situation française va s’améliorer avec la grande crise de 2008-2009. C’est la conséquence de la « variabilisation » des rémunérations comme principal levier d’ajustement. Mais à partir de 2010, nouveau retournement ! Et ce n’est plus l’Allemagne le coupable : les évolutions du coût du travail sont comparables des deux côtés du Rhin. Non, cette fois ci c’est par rapport aux pays du Sud que la France décroche. Leur politique de dévaluation salariale frappe de plein fouet la compétitivité coût de la France. La France va mettre deux ans à se décider à riposter. A partir de 2012, pacte de compétitivité puis pacte de responsabilité, le coût du travail fait une entrée fracassante dans le débat politique. Avec notamment le CICE, le coût du travail, mesuré par l’ICT, décélère enfin à partir de 2013. Mais si la position compétitive de la France s’améliore, la tendance reste bien modeste au regard de l’effort financier consenti par l’Etat. Oui le CICE a permis un allègement de coût du travail, mais une partie du crédit d’impôt alimente en fait les évolutions de salaires. Surtout, dans le même temps, les pays du Sud ne relâchent pas la pression, tandis que l’Allemagne redonne un tour de vis, ce qui ne fait vraiment pas l’affaire de la France. Résultat, dans cette lutte infernale du chacun pour soi dans la zone euro, la France doit mettre les bouchées doubles pour combler ses trois points de retard.
Le Graphique, Où en est la compétitivité-coût du travail en France ?, une vidéo Xerfi Canal
Publié le jeudi 25 septembre 2014 . 3 min. 06
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