Pour comprendre les dernières données sur le climat des affaires, en apparence flatteuses, il faut revenir sur les surprises et le suspense politique des derniers mois.
En juin, un séisme politique secoue la France : les 8 et 9, le Rassemblement National remporte haut la main les élections européennes. À la surprise générale, le président Emmanuel Macron réagit immédiatement en dissolvant l'Assemblée Nationale et en convoquant des élections législatives anticipées. Un acte qui plonge le pays, déjà fragile, dans une nouvelle ère d'incertitude. Les législatives, particulièrement tendues, voient le RN confirmer son ascension au premier tour. Jordan Bardella se profile comme le futur Premier ministre d'une probable cohabitation. Mais le second tour du 6 et 7 juillet réserve des surprises. Le front anti-RN réussit à s'unir et le Nouveau Front Populaire émerge comme la première force politique du pays, sans toutefois obtenir la majorité absolue. L'union de la gauche revendique la victoire et exige la nomination d'un chef de gouvernement issu de ses rangs, avec l'application rigoureuse de son programme politique. Pendant ce temps, les Jeux Olympiques, qui se déroulent du 26 juillet au 11 août, apportent une trêve bienvenue dans cette tempête politique. Mais ce répit est éphémère. Dès la fin août, les discussions reprennent de plus belle. Les 22 et 26 août, Emmanuel Macron rencontre les représentants des diverses forces politiques pour décider de l'identité du prochain Premier ministre, chargé de former un gouvernement dans un Parlement profondément divisé. Le suspense est à son comble : le programme économique du nouvel exécutif, attendu pour mi-septembre, pourrait bien déterminer l'avenir du pays.
C’est dans ce contexte mouvant qu’il faut replacer le redressement des principaux soldes d’opinions en août après deux mois de chute. Il faut donc prendre du recul. Dès lors, en comparant les chiffres à ceux de mai, on constate une baisse généralisée du climat des affaires dans presque tous les secteurs, à l'exception du bâtiment. Le climat de l'emploi, lui aussi, est en déclin, ce qui laisse présager une poursuite de la baisse du nombre de salariés dans le secteur privé. Les perspectives d'activité, elles, restent en deçà de celles de mai, sauf dans l'industrie, où les résultats de l'enquête contrastent fortement avec ceux des PMI, qui prévoient au contraire un ralentissement de l'activité dans les mois à venir. L'impact des Jeux Olympiques sur le secteur des services, notamment l'hébergement-restauration, reste flou.
En réalité, ce redressement d'août masque une situation bien plus fragile : le tissu productif français est affaibli, et l'économie du pays vacille. Les défaillances d'entreprises atteignent des sommets, avec plus de 63 000 procédures enregistrées sur 12 mois à fin juillet 2024, un niveau qui obligera bientôt la Banque de France à revoir l'échelle de ses graphiques ! En parallèle, les Français renforcent leur épargne par peur de l'avenir, portant l'encours du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire à près de 585 milliards d'euros. La collecte de juillet 2024 dépasse de loin la moyenne des dix dernières années, un signe de la prudence extrême des ménages. Pendant ce temps, l'inflation continue de peser sur le pouvoir d'achat, accentuant encore les difficultés économiques qui s'annoncent pour le second semestre. Les espoirs de croissance dépassant 1% s'amenuisent de jour en jour.
Ainsi, l'amélioration apparente du climat des affaires en août dissimule une réalité inquiétante. L'économie française, fragilisée par une conjoncture politique instable et une méfiance croissante des ménages, se prépare à affronter un second semestre sous haute tension. Le suspense reste entier : quelle sera l'issue de cette période critique pour la France ?
Publié le mardi 3 septembre 2024 . 4 min. 22
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de Philippe Gattet
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