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De l'évasion fiscale à la fraude, il n'y a qu'un pas

Publié le jeudi 30 novembre 2017 . 6 min. 14

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Les révélations des « Paradise Papers » ne nous ont rien appris de nouveau sur le fonctionnement des paradis fiscaux. Elles ont confirmé, une fois de plus, leur rôle de producteur industriel de produits d’opacité fiscale au bénéfice des plus aisés et des plus grosses entreprises. Pour autant, elles fournissent l’occasion de revenir sur trois idées reçues.

 

1ère idée reçue : tout cela est immoral mais légal

 

Les utilisateurs des paradis fiscaux avancent qu’ils ne font que suivre les conseils d’experts qui leur montrent comment utiliser au mieux les lois fiscales de différents pays, et leurs divergences, afin de réduire leur imposition à minima. Ce n’est peut être pas très moral mais cela n’a rien d’illégal.

 

Or, cette ligne de défense est fragile. Les enquêtes des paradise papers évoquent de possibles violations d’embargos, des financements secrets d’armements, d’éventuelles fraudes à la TVA. Attendons de voir si de prochaines investigations judiciaires ou fiscales ne considèreront pas certaines des pratiques mise au jour comme hors la loi.

 

Même en dehors de ces comportements possiblement litigieux, les techniques utilisées pour échapper aux impôts ne sont pas forcément des plus légales. Tout simplement car dans la très grande majorité des cas, la légalité des stratégies d’optimisation fiscale dite agressives des multinationales n’a jamais été testée. Par exemple, si un libraire avait porté plainte contre les montages fiscaux d’Amazon au Luxembourg, personne ne peut dire quelle aurait été l’issue du procès.

 

On en a eu une preuve lors d’une commission d’enquête menée en 2013 au parlement britannique par la députée travailliste Margaret Hodge. Elle a dévoilé une information interne du cabinet de conseil PriceWaterhouseCoopers : l’entreprise propose ses produits d’optimisation fiscale dès qu’ils ont 25 % de chance d’être acceptés par le fisc. Dit dans l’autre sens, alors qu’il reste 75 % de chances qu’ils soient déclarés non respectueux de la loi !

 

Un exemple qui permet de comprendre un aspect essentiel : ceux qui conseillent les utilisateurs des paradis fiscaux n’oeuvrent pas dans le domaine de l’application mais de l’interprétation des lois fiscales des différents pays. Rien ne dit, a priori, que ces interprétations soient toujours justifiées.

 

De plus, on sait déjà qu’aux yeux de la Commissaire européenne à la concurrence Margrethe Vestager, les montages fiscaux concernant Apple en Irlande, Amazon et Fiat au Luxembourg, Starbucks aux Pays-Bas et quelques autres, sont considérés comme illégaux au regard du droit européen. Les arguments sont donc nombreux qui jettent un doute sur la légalité des mécanismes à l’œuvre.

 

2ème idée reçue : Il  y a des paradis car il y a des enfers fiscaux

 

L’argument serait recevable si l’on se situait dans la cadre de la concurrence fiscale : par exemple avec un taux d’impôt sur les bénéfices à 12,5 % en Irlande contre 33 % en France, quoi de plus normal que les entreprises jouent de la loi irlandaise pour payer moins d’impôt ? Mais la réalité n’est pas celle-là.

 

La Commission européenne a montré que, de par les accords fiscaux secrets passés avec le fisc irlandais, le taux d’imposition d’Apple en Irlande était de 0,005 % ! 


 
Pour les particuliers, il faut se rappeler des révélations du Canard Enchaîné de juin 2015 : sur une liste des 50 plus grandes fortunes françaises, 11 payaient zéro ISF et l’ensemble du groupe payait au total seulement 10 % de l’ISF dû !

 

Pour les utilisateurs des paradis fiscaux, un euro d’impôt, c’est déjà un euro de trop !

 

Enfin, 3ème idée reçu : On ne peut rien faire

 

Qui a dit : « les puissants capitalistes, habitués à des placements extérieurs, ont beaucoup plus de facilités pour dissimuler une part considérable de leur actif que les gens de qualité moyenne ou très modeste » » ? Jean Jaurès à la tribune de l’Assemblée nationale le 12 juin 1912 ! Plus d’un siècle après, rien ne semble avoir bougé. Surtout si l’on rappelle que la France a alors tenté de répondre au problème en signant avec d’autres pays des accords d’échange automatique d’informations fiscales, exactement ce que met en œuvre l’OCDE aujourd’hui !

 

De fait, si le résident d’un pays veut ouvrir un compte ou réaliser des transactions dans un autre pays, le fisc de son pays d’origine en sera désormais automatiquement informé. La moitié des paradis fiscaux donnent l’information depuis septembre dernier, l’autre moitié s’y est engagée pour septembre 2018. De quoi porter un réel coup au secret bancaire.

 

D’autres techniques existent pour dissimuler ses revenus comme les trusts, des entités juridiques qui, une fois désigné un directeur de paille, permettent de gérer des fortunes sans que l’identité de ceux qui apportent l’argent comme de ceux qui en bénéficient soit connue. L’Europe a engagé en 2015 un processus visant à contraindre ses Etats membres à tenir des registres centraux des propriétaires effectifs des sociétés et autres entités légales, y compris les trusts mais rien n’est encore opérationnel et nombre de paradis fiscaux, de même que l’Allemagne, font de la résistance.

 

Et côté entreprises, l’OCDE est en train de rendre opérationnel un plan en 15 points baptisé BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) qui tente de contenir les principales techniques d’évitement fiscal utilisées par les multinationales.
Toutes ces évolutions vont dans le bon sens.

 

Nul doute que du côté des riches particuliers et des grandes firmes on bâtisse déjà les moyens de contourner ces nouvelles règles. Mais c’est la première fois depuis un siècle que les Etats tentent d’encadrer ces comportements fiscaux douteux. Et on n’arrêtera plus le train associant lanceurs d’alerte, sociétés civiles et journalistes d’investigation qui continueront à mettre la pression sur les dirigeants politiques pour qu’ils agissent. Le combat contre les paradis fiscaux est lancé. Il ne fait que commencer.

 

Christian Chavagneux, De l'évasion fiscale à la fraude, il n'y a qu'un pas, une vidéo Xerfi Canal Economie.


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