La régression mercantiliste de Trump

Et si la stratégie économique et commerciale de Donald Trump ne relevait pas d’un simple repli nationaliste ou d’un dévoiement du libéralisme économique, mais plutôt d’un retour – conscient ou non – à une pensée ancienne : le mercantilisme ? Cette doctrine, dominante du XVIe au XVIIIe siècle, considérait que la richesse d’une nation dépendait de son stock de métaux précieux, de sa capacité à exporter davantage qu’elle n’importait, et à protéger ses industries stratégiques. Le commerce était vu comme un instrument de puissance au service de la souveraineté..
L’économie comme champ de rivalités

Trump conçoit les échanges économiques non comme des espaces de coopération, mais comme des confrontations. Pour lui, chaque contrat, chaque traité, chaque relation commerciale implique un gagnant et un perdant. Il valorise les accords bilatéraux dominés par la force, au détriment des accords multilatéraux fondés sur la négociation. Cette vision du commerce comme un affrontement perpétuel fait écho aux fondements du mercantilisme, où chaque nation cherchait à s’enrichir au détriment des autres.
>>>  Le commerce comme guerre.
L’obsession de l’excédent

Dans la pensée de Trump, une balance commerciale déficitaire est un signe d’échec. Il juge la performance économique d’un pays comme celle d’une entreprise, en se focalisant sur le solde des échanges. Cette lecture, aujourd’hui dépassée, ne tient pas compte des chaînes de valeur mondiales, des investissements croisés ni des bénéfices à long terme d’un commerce ouvert. Pourtant, elle correspond à la vision mercantiliste classique, pour laquelle seul l’excédent exprimait la grandeur d’un pays.
>>> L’excédent comme objectif.

Des barrières douanières comme levier politique
Trump utilise largement les droits de douane comme outil de négociation. Il les présente comme des mesures de rétorsion légitimes pour défendre les intérêts américains. Dans les faits, ils servent souvent à exercer une pression directe sur les partenaires, notamment la Chine ou l’Union européenne. Cette instrumentalisation rappelle la logique punitive du mercantilisme, qui utilisait le commerce comme bras armé de la politique extérieure.
>>> La douane comme arme.

Une vision défensive de l’économie
Enfin, la méfiance de Trump à l’égard des institutions multilatérales (l’OMC, l’OTAN, les accords commerciaux) traduit une volonté de recentrer l’économie sur le national. Il promet de « rendre sa grandeur à l’Amérique », mais par le retrait, la fermeture et le refus des règles communes. Cette posture défensive, méfiante, renoue avec l’idée d’un État autosuffisant, protégé, et maître de ses échanges.
Le repli comme solution.

Un héritage ancien, une stratégie assumée
Ainsi, la politique économique de Trump n’est pas un simple accident populiste. Elle s’inscrit dans une tradition ancienne, souvent oubliée, mais profondément structurante : celle du mercantilisme. Ce courant, longtemps éclipsé par le libre-échange et la mondialisation, refait surface sous une forme adaptée aux enjeux contemporains, marquée par l’obsession de la  souveraineté, le rejet des dépendances et la négociation par des de rapports de force exacerbés.