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Comment transformer la magie en drame psychologique ? C’est ce qu’illustre le syndrome du rabbit hole, ce bon vieux terrier de lapin venu tout droit d’Alice au Pays des merveilles. Tout le monde connait ce conte où Alice poursuit un lapin pressé et plonge dans son terrier, ce qui la conduit dans un monde étrange et fantastique peuplé de créatures et de situations surréalistes.
Il fut un temps où le rabbit hole symbolisait l’entrée dans un univers foisonnant d’imaginaire et de découverte. Alice, guidée par sa curiosité, tombait dans ce passage secret pour explorer un monde absurde et merveilleux où la logique se délitait au profit de la rêverie.


Mais aujourd’hui, que reste-t-il de cette métaphore ? Le rabbit hole n’évoque plus le voyage initiatique, mais une chute sans fin dans l’ombre numérique. Sur YouTube, Reddit ou TikTok, il désigne désormais l’engrenage de l’algorithme, ce mécanisme vorace qui nous attire dans des abîmes de contenus polarisés, répétitifs, et souvent toxiques. Ce glissement sémantique est bien plus qu’un simple changement linguistique : il reflète l’inversion de notre imaginaire collectif, qui semble passer de la rêverie à la dépendance, de la découverte à l’aliénation.


Lorsque Lewis Carroll introduit le rabbit hole dans Alice au pays des merveilles, il invite à une rébellion douce contre la rationalité rigide de l’époque victorienne. La chute d’Alice est une métaphore de l’abandon : elle se laisse happer par l’inconnu, se livre sans résistance à une aventure où la logique vacille pour laisser place à l’émerveillement. Ce terrier est une porte vers des mondes où la pensée se déploie en arabesques, où les questions absurdes sont plus importantes que les réponses.


Le terrier d’Alice n’a pas de fond. Mais cette absence de limite est libératrice : elle ouvre un espace où l’esprit s’échappe et se réinvente. C’est un lieu de curiosité, où le temps se dilate, où les règles s’inversent pour mieux redonner vie à notre capacité d’émerveillement.


Aujourd’hui, le rabbit hole s’est vidé de tout contenu poétique. Il ne mène plus à des royaumes étranges et enchanteurs, mais à des spirales d’informations infinies et étouffantes. Une simple vidéo, un clic, et l’algorithme vous entraîne dans un flux interminable où chaque contenu vous enferme davantage dans une bulle de confirmation ou une polarisation accrue.


Là où Alice se perdait avec émerveillement, l’internaute s’égare avec anxiété. L’algorithme ne nourrit pas la curiosité, il la cannibalise. Il ne libère pas l’imaginaire, il le cloisonne dans des cycles de répétitions stériles. Ce que Carroll voyait comme une brèche dans le réel est devenu un puits sans fond où l’esprit s’épuise. Ce n’est plus l’inconnu qui appelle, mais le familier, ressassé jusqu’à l’écœurement.


Cette transformation du rabbit hole est le symptôme d’un glissement culturel profond. Là où nos récits invitaient autrefois à l’évasion, ils cultivent désormais la saturation. La quête de sens est remplacée par une quête d’attention, le voyage initiatique par un scroll infini.


La mort de l’imaginaire ne signifie pas l’absence totale de créativité, mais sa réduction à des boucles prédéfinies, des stimulations programmées. L’algorithme ne sait pas rêver. Il calcule. Il sait ce que vous avez aimé hier et vous le ressert ad nauseam, sans jamais vous offrir la possibilité de vous égarer. Là où le rabbit hole d’Alice ouvrait à l’infini, celui des plateformes numériques nous enferme dans un labyrinthe sans sortie.


La métamorphose du rabbit hole est un signal d’alarme : il est urgent de réinvestir notre imaginaire. De refuser l’enfermement algorithmique pour retrouver la joie de l’exploration libre, débridée, imprévisible. Cela passe par une reconquête de notre temps, de notre attention, mais aussi de nos récits. Car sans ce rabbit hole poétique, sans cet espace où l’esprit s’autorise à déborder du réel, nous risquons de devenir les prisonniers consentants d’un monde où tout est calculé, prévu, optimisé. Un monde sans imaginaire où l’humanité déserte sur la pointe des pieds ?


Publié le mardi 03 juin 2025 . 4 min. 40

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