Depuis l’instauration du remboursement de la téléconsultation en 2018, le secteur a connu une croissance fulgurante, accélérée par la crise sanitaire. En 2020, les règles ont été largement assouplies : consultations autorisées sans connaissance préalable du patient, remboursement à 100 %, autorisation de la téléphonie. Cela a permis un véritable décollage de la pratique. Mais cette phase d’expérimentation touche aujourd’hui à sa fin.
L’État reprend le contrôle du numérique médical
Selon l’étude Xerfi Le marché de la e-santé à l’horizon 2027, l’État a repris la main avec un dispositif d’agrément obligatoire pour les sociétés de téléconsultation, conditionnant l’accès au remboursement par l’Assurance maladie. Ce régime impose 206 critères techniques, un encadrement médical renforcé, et des contraintes économiques : plafonnement de l’activité de télémédecine à 20 % pour les médecins salariés (40 % en psychiatrie, dérogation possible jusqu’à 50 %).
Réancrer la téléconsultation dans les territoires
Autre rupture majeure : la réintégration du numérique dans l’écosystème de soins territorial. Les nouvelles exigences imposent que les médecins téléconsultants exercent aussi en présentiel. Objectif : éviter l’émergence de plateformes hors-sol, garantir la continuité des soins et replacer la téléconsultation dans un parcours médical structuré et cohérent.
Une recomposition industrielle en cours
Ce recentrage réglementaire intervient dans un contexte de tension économique. Plusieurs acteurs emblématiques — Dreem, BioSerenity, H4D — ont été placés en redressement judiciaire. Le modèle économique de la téléconsultation, très dépendant des politiques publiques et du financement privé, révèle ses fragilités.
L’IA : opportunité ou cheval de Troie ?
Les éditeurs les plus solides — Doctolib, Cegedim — misent désormais sur des solutions intégrées avec intelligence artificielle. Automatiser les tâches administratives, optimiser le temps médical, prédire les flux de soins : l’IA promet des gains d’efficience. Mais elle ouvre aussi la porte à un nouveau risque, rarement abordé : celui de l’exploitation des données de santé à des fins commerciales ou assurantielles. Ces données, parmi les plus sensibles, intéressent autant les géants de la tech que les investisseurs. La concentration croissante des données dans quelques plateformes soulève donc une question essentielle de souveraineté numérique, de transparence des usages, et de respect du secret médical.
Vers une e-santé responsable, mais sous surveillance
La téléconsultation entre dans une nouvelle phase. Après l’enthousiasme technologique, vient le temps de la vigilance démocratique. La France peut devenir un modèle d’équilibre entre innovation numérique, exigence médicale et éthique des données. À condition de ne pas fermer les yeux sur les nouveaux pouvoirs que confèrent les algorithmes et les bases de données.
Publié le mardi 27 mai 2025 . 3 min. 28
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