Le métavers ou metaverse (on n’a jamais bien su comment l’appeler), vous vous souvenez ? Il y a moins de quatre ans, c’était le nouveau Graal, the « next big thing » comme disent les Américains. Cela vous paraît sûrement très loin, parce que la vague suivante de la tech, celle de l’IA générative, a tout emporté sur son passage, mais rappelez-vous. Le monde sortait de la crise du covid, des confinements à répétition, quand Mark Zuckerberg a annoncé que le groupe Facebook allait changer de nom pour incarner sa nouvelle vocation : Meta, comme métaverse. Le métaverse était un univers virtuel immersif dans lequel nous allions tous vivre, parallèlement à nos vies réelles. Internet allait se transformer en plusieurs mondes en 3D dans lesquels se déplaceraient nos avatars. Le monde de Meta s’appellait Horizon Worlds. Les consultants de McKinsey évaluaient déjà le marché du métaverse à 5 000 milliards de dollars, et leurs confrères de Gartner affirmaient que 25 % de la population occidentale passerait au moins une heure par jour dans le métavers en 2026. Inutile de vous dire qu’en 2025 nous en sommes très très loin.
Si vous ne vous êtes jamais promené dans le métavers à l’époque, imaginez que vous vous déplaciez dans un jeu vidéo assez sophistiqué. Avec votre avatar, un personnage qui vous ressemblait, vous pouviez vous payer un sac Gucci ou une paire de sneakers Adidas - à condition d’avoir acheté d’abord des cryptomonnaies. Vous pouviez aussi spéculer sur les terrains virtuels. Beaucoup de marques, comme Carrefour par exemple, se sont empressées de s’offrir un emplacement tant que cela ne coûtait que quelques dizaines de milliers d’euros. En 2022, on disait partout que c’était un investissement formidable.
Cela dit, tout le monde n’a pas cédé aux sirènes du métavers : vous ne pouviez pas, par exemple, y rouler en Tesla parce que Elon Musk, pourtant acharné des cryptomonnaies, n’y a jamais cru. Bref, à la fin de l’année 2022, le métavers de Meta, ne comptait que 200 000 utilisateurs mensuels malgré la pression de Mark Zuckerberg qui poussait tous ses salariés à y aller pour booster les statistiques…
Aujourd’hui, le métavers n’a pas vraiment disparu, mais l’essentiel des usages est concentré sur les grosses plateformes de jeu en ligne (Minecraft, Fortnite, Roblox). Elles existaient bien avant qu’on invente le mot Metavers et rassemblaient déjà des dizaines de millions de joueurs. Il y a aussi quelques organismes publics qui l’utilisent, pour partager un projet de réhabilitation urbaine par exemple. Mais on parle alors plutôt de monde immersif ou de Web 4.0.
Pour Meta, le métavers a donc été un échec retentissant. Pendant l’année 2022, l’action a perdu 60% de sa valeur en Bourse. Les autres gafam subissaient aussi le contrecoup de la période covid qui avait été si florissante pour eux, mais Meta battait tous les records à la baisse. Et il a fallu attendre 2023, des milliers de licenciements et surtout l’avènement de l’intelligence artificielle générative – ce nouvel engouement mondial pour lequel Meta est, là, bien dans la course – pour que l’action revienne en grâce et se remette à tutoyer les sommets.
Même pas mal, donc, pour Meta ? Le métavers lui aura quand même coûté –tenez-vous bien - 50 milliards de dollars en trois ans. Mark Zuckerberg, qui s’est excusé pour beaucoup de fautes ou d’erreurs depuis qu’il a fondé Facebook, n’a pas reconnu celle-là officiellement. Il est vrai que c’est presque un détail, quand on exploite une rente publicitaire qui vous rapporte 164 milliards de dollars par an, en 2024. Il reste quand même ce nom, Méta, qui lui colle à la peau et rappelle son échec. Ce sera la leçon de cette histoire : quand vous changez de stratégie, attendez de constater qu’elle fonctionne pour changer de nom !
Publié le mercredi 02 avril 2025 . 3 min. 51
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