En 2025, Los Angeles a connu l’un des incendies les plus ravageurs de son histoire. Des quartiers entiers ont disparu sous les flammes, laissant des milliers de familles sous le choc. Pourtant, une question demeure : pourquoi construit-on encore des maisons en bois dans une région où les incendies sont une menace permanente ?
La réponse réside dans un phénomène puissant, théorisé par l’économiste Paul David : l’inertie des choix passés. Au XIXe et XXe siècle, alors que les États-Unis étaient en pleine expansion, il fallait bâtir des villes rapidement et à moindre coût. Le bois, abondant et bon marché, s’est naturellement imposé comme le matériau de référence pour la construction des maisons individuelles.
Avec le temps, la maison en bois est devenue bien plus qu’un simple choix économique, elle est devenue un symbole de l’American Dream, celui de la réussite individuelle et de l’accès à la propriété.
Aujourd’hui encore, même si on sait que le béton est plus solide, plus durable et, surtout, ininflammable, une majorité d’Américains continue de privilégier le bois. C’est l’effet de l’inertie des choix passés, un phénomène social où chaque décision, chaque innovation renforce la précédente. À force de construire des maisons en bois, tout un écosystème de construction s’est structuré autour de ce modèle :
- Les architectes conçoivent leurs plans en fonction des normes du bois
- Les banques et les assurances fondent leurs calculs de coûts sur des constructions en bois
- Les usines produisent en masse des matériaux pour la construction en bois
- Les ouvriers et les entrepreneurs sont formés aux techniques du bois
Finalement, le choix du bois n’est pas le fruit d’une volonté individuelle, mais une solution qui s’impose comme une évidence, un impératif culturel par lequel le passé dicte le futur.
Bien évidemment, ce phénomène ne se limite pas à l’urbanisme. On le retrouve au sein même des organisations. Prenons l’exemple d’une entreprise qui, pendant des décennies, a adopté une culture de contrôle hiérarchique strict. Au fil du temps, les critères de recrutement ont privilégiés les candidats ayant des profils conformes à cette approche. Les nouveaux employés ont alors intégré et reproduit ces pratiques, écartant progressivement toute alternative de fonctionnement radicalement différente.
Mais si l’environnement évolue et qu’une approche plus flexible devient nécessaire, l’organisation risque de se retrouver piégée par son propre passé, incapable de s’adapter efficacement. Face à ce qui sera perçu comme une incongruité ou une injustice, l’inertie de ses choix passés risque de s’accentuer et de déclencher un réflexe d’autodéfense, l’enfermant dans une spirale toujours plus difficile à briser.
Qu’il s’agisse d’urbanisme ou de management, le passé a souvent la main lourde sur l’avenir. Enrayer l’inertie des choix passés exige bien plus qu’une prise de conscience : il faut un choc qui bouscule les certitudes, une rupture qui libère les énergies et les talents vers de nouveaux horizons.
Publié le mardi 13 mai 2025 . 3 min. 27
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