Avec plus d’un demi-milliard d’utilisateurs, la popularité de PowerPoint est aujourd’hui indéniable. Ce logiciel édité par Microsoft permet de concevoir et de projeter sur écran des présentations plus ou moins sophistiquées allant du simple diaporama de textes et d’images à de véritables animations intégrant vidéos, infographies interactives et réalité virtuelle augmentée.
Cela fait de PowerPoint un outil de communication à part entière, capable de combiner la projection sur écran d’un support dont le déroulé suit la parole de l’orateur. Cette association du visuel et du sonore confère à PowerPoint un impact potentiellement nettement supérieur à celui du simple discours derrière un pupitre.
Mais un tel avantage passe difficilement inaperçu. Il est d’ailleurs à l’origine de nombreuses critiques dénonçant certaines de ses dérives. PowerPoint peut en effet s’avérer un outil idéal pour lyophiliser un projet, ennuyer un auditoire, feindre la transmission de connaissances et assujettir les consciences à l’esthétique du simplisme absolu.
Pour ses déconstructeurs, PowerPoint ne doit pas être considéré comme un simple logiciel épris de bonnes intentions avec pour objet la connaissance et pour finalité la recherche de la vérité par le dialogue. A leurs yeux, PowerPoint est une « machine à convaincre » qui impose sa vision du monde à l’aide d’une rhétorique assistée par ordinateur. Son usage intensif et extensif contribue à la dissémination d’une pensée unique dont les valeurs cardinales sont la simplicité, la rapidité et la performance.
De telles accusations sont-elles vraiment justifiées ? Faut-il combattre l’usage de PowerPoint ou bien l’usage qu’en font ses utilisateurs ? En d’autres termes, faut-il considérer PowerPoint comme un outil inerte dépourvu de toute intention ou bien faut-il voir à travers lui, un conditionnement des esprits et un formatage de la façon de penser sa communication ?
Ces questions soulèvent un dilemme philosophique : Peut-on et faut-il dissocier l’objet de son usage ? Pour John Stuart Mill, la responsabilité de l'usage que l'on fait d’un objet incombe principalement à son utilisateur. A l’image d’un couteau qui peut être un simple objet de cuisine ou une arme blanche capable de tuer. Mais pour Martin Heidegger, il faut être bien naïf pour croire à la neutralité des objets car leur nature même influence l’usage que l’on en fait.
A cet égard, la neutralité de PowerPoint est donc discutable. Les contraintes d’espace, de caractères associées aux possibilités graphiques incitent à projeter des slogans ou des punchlines, des histogrammes simplifiés, des images et des clips vidéos spectaculaires, le tout encourageant des explications sommaires ou métaphoriques.
Mais n’est-il pas excessif de prêter à PowerPoint la capacité de conditionner à lui seul un résultat ? N’est-ce pas sous-estimer la potentielle capacité critique d’un auditoire et faire un procès d’intention à son médiateur ? Cela est d’autant plus que les fonctionnalités de PowerPoint peuvent être mises au service d’une intervention destinée à éveiller les esprits, à susciter le questionnement et à enrichir l’entendement dans un subtile mélange de parole, d’images et d’interaction avec l’audience.
A l’arrivée, si on ne peut pas totalement dissocier l’objet de son usage, il est bien présomptueux de prêter à l’objet une conscience, n’en déplaise aux amateurs d’anthropomorphisme.
Publié le mardi 21 janvier 2025 . 3 min. 48
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