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À vouloir tout mesurer : la tyrannie des chiffres

Publié le mardi 21 juin 2016 . 3 min. 48

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Dans son livre, « La gouvernance par les nombres », le Professeur au Collège de France Alain Supiot note que « la comptabilité est la première institution moderne à avoir conféré une vérité légale à des nombres. » Nous pourrions ajouter que c’est le management dans son ensemble, dans sa capacité d’inspirer toutes les fonctions de l’entreprise, qui se présente du reste comme une science de la mesure et du calcul.

 

Mais il faudrait toutefois ajouter un point important : comme l’ont montré les études qui se sont intéressées aux différentes significations du management à travers les siècles, le management est aussi l’expression d’une certaine prudence, d’une modération. Pour saisir cette double inflexion il faudrait donc considérer le mot mesure dans sa double acception : la mesure ne serait pas seulement les « poids et mesures », autrement dit l’évaluation quantitative. Ce serait aussi l’exercice même du jugement, où s’exprime une certaine tempérance, une pondération. Dans la gravure du mélancolique de Dürer, à côté du sablier et de la cloche figure bel et bien la balance.

 

Et pourtant nombreux sont les exemples dans l’actualité récente, des prises illégales d’intérêt de Bernie Ebbers, l’ancien Président de MCI Worldcom, aux mystifications de Kenneth Lay, l’ancien dirigeant d’Enron, montrent que ce deuxième sens de la mesure semble avoir été délaissée, voire dédaignée. La démesure touche la profession de manager, et peut-être davantage que n’importe quelle autre.

 

Mais est-ce donc toute forme d’évaluation et de mesure qu’il faudrait faire disparaître en management? En réalité dans tout système économique il est question de tester et d’évaluer empiriquement selon des méthodes reconnues par tous, sans quoi c’est l’arbitraire qui règne à tous les étages. Cependant certaines choses dans les organisations, si elles sont parfois difficiles à dire avec des mots, sont en revanche impossibles à quantifier, voilà ce qu’il serait bon de reconnaitre à nouveau. Dans les phénomènes collaboratifs entre humains tout n’entre pas dans un calcul : la solidarité entre les êtres, l’effort collectif, la joie du travail, ces notions centrales dans la réussite d’une entreprise, rien de tout cela n’existe aux yeux des chiffres. Comme le soulignait Kant en son temps, la dignité humaine elle-même ne peut entrer dans un système de calcul car elle est précisément ce qui lui échappe, elle est par définition ce qui est supérieur à n’importe quel montant quel qu’il soit, car la dignité n’a pas de prix.

 

S’il veut éviter de manquer son objet, le management ne peut donc se satisfaire d’en appeler à la « gouvernance par les nombres », dans un monde organisationnel peuplé d’individus et de gestes qui résistent par nature à l’évaluation quantitative. C’est précisément ce qu’on pu oublier Kenneth Lay et Bernie Ebbers en tant que symptômes, ou victimes consentantes, de la quantophrénie ambiante, de cette sorte de maladie de la mesure que l’on voit s’afficher et dominer tous les domaines de la vie sociale.

 

Face à cette tendance massive à penser que tout se mesure, que rien ne compte que les critères chiffrés de la mesure, que rien n’y échappe, et ce jusqu’à la démesure, il faudrait donc en revenir à la modération et au jugement qui furent dans le passé le second sens du management. Ce sens qui passe par une culture de l’interprétation, et qui passe donc par le recours aux humanités, à l’histoire, à l’éthique et à l’esthétique. Sans quoi c’est face à la « tyrannie » des chiffres qu’il faudra bientôt capituler, et du tout-évaluation, pour employer ici l’expression de l’ouvrage récent de la philosophe Barbara Cassin intitulé « Derrière les grilles ». « Derrière les grilles », sous-entendu : derrière les barreaux.


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