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Enseigner les humanités est-ce encore utile ?

Publié le mercredi 26 septembre 2018 . 4 min. 14

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« Plutôt que d’approfondir les recherches universitaires hautement théoriques, nous encourageons une éducation plus technique et professionnelle qui anticipe mieux les besoins de la société ». Ce discours prononcé à l’ONU par le premier ministre japonais Shinzo Abe a le mérite de la clarté à l’endroit des études de lettres, d’histoire et de philosophie. A la suite de cette déclaration, l’initiative a été prise de faire disparaître bon nombre de départements de sciences humaines. Selon un conseiller du Ministre, « les étudiants doivent d’abord apprendre à utiliser les logiciels de comptabilité plutôt que lire les textes de l’économiste Paul Samuelson, et apprendre la traduction anglais-japonais utile pour l’explication touristique aux visiteurs étrangers plutôt que Shakespeare. »


Cette petite histoire nippone, établie par le traducteur de Derrida en japonais Yuji Nishiyama, met en évidence l’extrême fragilité des enseignements littéraires face au pouvoir et à la société. Dans l’esprit de beaucoup en effet, bien au-delà des élites politiques tokyoïtes, les études littéraires et philosophiques seraient inutiles face aux progrès de la technologie, la preuve en serait la quasi-nullité de leur valeur d’usage sur le marché du travail.


Le problème avec cette analyse c’est qu’elle est non seulement fausse mais aussi très dangereuse. Il serait très imprudent de lui accorder le moindre crédit.


Fausse en effet : l’utilité des humanités n’a jamais été aussi précieuse pour former des citoyens et des acteurs responsables. Comme le soulignent les auteurs de cet ouvrage collectif dont fait partie ce texte de Nishiyama, Université ou anti-université – les humanités dans l’idée de formation supérieure, ces disciplines sont irremplaçables pour favoriser, notamment, la sensibilité éthique et esthétique, la communication écrite et orale entre des personnes de culture différente, l’éclairage intellectuel des futurs votants que nous sommes, bref l’autonomie de pensée de chacune et de chacun. Pour appréhender le futur nous avons besoin d’une humanité qui soit curieuse et ouverte d’esprit ; or les Humanités y participent en premier lieu.


Les élites américaines, auxquelles on reproche un peu vite une certaine inculture, l’ont bien mieux compris que nous : dans les établissements à la réputation mondiale comme Harvard, le MIT, Stanford, où co-existent quinze département en sciences humaines, les « liberal arts » sont au cœur du dispositif pédagogique. En Angleterre, une étude montre que plus d’un tiers des entreprises du « FTSE 100 » sont dirigées par des diplômés en sciences humaines et sociales. En France, un article paru dans cadreemploi.fr sur les jeunes diplômés 2018 titre sans équivoque : « les sciences humaines font un carton ». Je cite : « comme l’an passé, les diplômés en sciences humaines et sociales sont les plus nombreux à travailler, avec un taux d’emploi record de 88% un an après leur arrivée sur le marché de l’emploi. »


Aux thuriféraires de l’abandon progressif des Humanités à l’école, il faut aussi rappeler le danger que comporte le simplisme de leurs discours : devant l’économie computationnelle qui vient, celle de l’intelligence artificielle anticipant jusqu’à nos propres désirs, il nous faudra être capable de reprendre l’initiative et de penser par nous-mêmes.


Hannah Arendt expliquait notamment qu’une personne cultivée c’était d’abord « quelqu’un qui (savait) choisir ses compagnons parmi les hommes, les choses, les pensées, dans le présent comme dans le passé. » Tout se passant comme si la culture philosophique, au fond, servait d’abord à identifier les talents, à créer des liens de confiance avec autrui, à faire le tri parmi les idées prétendument neuves, trois aptitudes qui, n’est-ce pas ?, peuvent paraître essentielles dans le management des organisations.


Il importerait toutefois, comme le rappelait Jacques Derrida lui-même de « ne pas se laisser enfermer dans le dedans des Humanités ». Ces domaines des sciences douces seraient donc bien inspirées de s’ouvrir à d’autres pratiques où « se déploie l’exercice de la pensée », tels par exemple que la gestion, l’industrie ou le marketing. Sur le modèle justement du Collège International de Philosophie, que Derrida co-fondait en 1983, et qui est précisément à l’initiative de cet ouvrage que je vous présentais aujourd’hui.


D'APRÈS LE LIVRE :

Université ou anti-université: Les Humanités Dans L'idée De Formation Supérieure

Université ou anti-université: Les Humanités Dans L'idée De Formation Supérieure

Auteur : Carlo Cappa, Donatella Palomba, Paolo Quintili
Date de parution : 01/12/2016
Éditeur : Editions L'Harmattan
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