Vous avez tous entendu parler des « injonctions contradictoires », n’est-ce pas ? Ainsi que les dégâts qu’elles peuvent provoquer chez les personnes qui les subissent ?
Mais si elles pouvaient être aussi un moyen de management ?
Cela vous semble cynique ? manipulatoire ? C’est peut être seulement une bonne pratique dans des contextes spécifiques ?
Petit rappel sur l’injonction contradictoire : c’est Gregory Bateson qui en 1956 au sein de l’école de Palo Alto conceptualise la notion en parlant de « double bind », de double nœud ou double lien en français, ou encore de double contrainte. Ce concept décrit des situations d’éducation où les parents vont mettre leurs enfants dans des situations impossibles où on ne peut obéir sans désobéir. Bateson et ses collègues pointent ces injonctions contradictoires comme l’origine de troubles mentaux graves chez les enfants, voire même de la schizophrénie.
L’exemple classique d’une injonction contradictoire est « sois spontané » : si on tente d’obéir, on ne peut plus être spontané, si on s’y oppose, non plus …
Si on revient au domaine du management : ce sera : « faire plus avec moins », « sois créatif en respectant les règles », « ou encore « prends tes congés mais rends tes dossiers … », toutes sortes d’injonctions qui a minima mettent mal à l’aise, souvent perturbent, déstabilisent et rendent coupables ceux qui les subissent.
La littérature en management sur les injonctions contradictoires ou encore paradoxales est immense. Elle a toujours comme objectif de les dénoncer, et les faire disparaitre, car un bon manager ne peut mobiliser, même de façon inconsciente ce type de procédé.
Pourtant ….
N’y aurait-il pas, parfois, dans des contextes spécifiques, une bonne façon de mobiliser les injonctions contradictoires ?
C’est le philosophe Remy Prague qui nous met sur la voie en expliquant que dans les milieux confinés, où on est amenés à cohabiter dans des espaces restreints pendant de longue période, l’injonction contradictoire peut être une bonne façon d’écarter des esprits fragiles. Il évoque la vie dans un sous-marin ou celle au sein d’une communauté religieuse dans un couvent.
Un exemple de cette mobilisation du contradictoire est par exemple une porte sur laquelle est mentionnée d’un côté « cette porte doit rester ouverte » et de l’autre « cette porte doit être maintenue fermée « , sachant que les contextes évoqués exigent dans les deux cas une stricte observance des ordres donnés.
Ceux ou celles qui ne pourront dépasser cette double injonction seront certainement en difficulté pour résister sur le long terme à des situations de cohabitation et de confinement extrêmes.
En situation classique de management, ne voit-on pas finalement les mêmes évolutions ?
Être en capacité de « faire quelque chose » des injonctions contradictoires ne pourrait-il pas démontrer une capacité de résistance ? Et même un vrai potentiel créatif ?
Nous rencontrons régulièrement des personnes capables d’évoluer dans le contradictoire :
- elles l’évacuent et s’en moquent en créant leur propre chemin,
- elles le dépassent en construisant des solutions créatives,
- elles le dénoncent en le démasquant et en retournant la manipulation contre son émetteur,
Elles se font confiance et ils font confiance à leur bon sens.
Dans des environnements qui peuvent vite devenir toxiques, ces comportements sont salvateurs, et démontrent de belles capacités à évoluer vers des positions de leaders.
Quand vous rencontrerez une situation qui relève d’injonctions contradictoires. Car c’est extrêmement courant, voyez comment vous pouvez en faire quelque chose de gagnant.
Certes, ce sont des pistes de réflexion qui contredisent ce qu’on dit sur le contradictoire !
Mais c’est parfois bon d’être dans la contradiction !
Publié le mardi 16 juin 2020 . 3 min. 59
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