Les adolescents et les jeunes adultes d’aujourd’hui – que l’on qualifie aussi de Millenials, de Digital natives ou de Génération Z selon le cas – ont toujours vécu dans un contexte de crises successives ; cela a fait de la grande majorité d’entre eux des individus à la fois très réalistes et très pragmatiques. Ils savent qu’ils devront être en mesure de se débrouiller en permanence et savoir faire preuve d’optimisme pour ne pas être dominés par leur environnement. D’ailleurs dans son livre « Petite Poucette », le philosophe Michel Serres est convaincu que ces mutants, qui ont acquis une vraie dextérité pour écrire à toute vitesse des sms avec leurs pouces, sauront profiter de ces prolongements d’eux-mêmes que constituent les technologies connectées de la communication pour accompagner les révolutions qui sont en marche.
Selon le Rapport Cassandra publié en 2015, l’émotion est pour eux une dimension moins importante qu’elle ne l’était pour leurs aînés. De fait, ce qu’ils demandent en priorité est la vérité dans tout ce qui relève de la sphère relationnelle (personnelle, professionnelle voire politique) ainsi que la transparence, ce qui est peut-être la conséquence de leur omniprésence sur les réseaux sociaux.
Pragmatisme, réalisme et vérité seront aussi les maîtres mots auxquels une marque devra être très attentive si elle veut pouvoir espérer créer du lien avec les jeunes consommateurs d’aujourd’hui et gagner leur confiance. Toutefois, ce sérieux apparent qui transparaît derrière ces valeurs ne signifie pas qu’ils sont plus tristes que ne l’étaient les générations précédentes au même âge ; bien au contraire, ils savent manier l’humour dans tous les sens et, comme l’indique Pascale Ezan qui parle de culture LOL, le fait qu’ils soient rompus à l’univers de la consommation, qu’ils soient éduqués et hyper informés, leur permet de privilégier l’humour pour construire leur rapport avec les marques.
Alors que la génération qualifiée de Y se caractérisait plutôt par de la tolérance à l’égard de nombreuses question sociétales, les jeunes nés depuis la fin du XXème siècle revendiquent pleinement, quant à eux, leur diversité et s’inscrivent dans une logique de solidarité plus marquée. C’est pourquoi, les différences que l’on peut observer entre les individus (origine, ethnie, mode de vie, goûts, orientation sexuelle…) n’en sont pas vraiment pour eux ; elles traduisent plutôt la très grande variété des possibles au sein de ce que l’on appelle l’humanité ; mais, en même temps, elles véhiculent l’idée selon laquelle les responsabilités doivent être partagées par tous.
Ils ont grandi au milieu d’un discours écologique à la fois omniprésent et anxiogène, de débats économiques que la disparition des grandes idéologies rendait moins clivants – mais aussi moins simplistes – et leurs premiers souvenirs forts de communication étaient en lien avec le 11 septembre ou ses conséquences. Ce qui est durable, ce qui respecte l’environnement et, de manière beaucoup plus large, tout ce qui relève de l’éthiquement correct n’est pas négociable pour cette génération.
Ceux qui appartiennent à cette jeune génération donnent la priorité aux principes au détriment des marques dans les catégories de produits qui les intéressent. Donc pour espérer gagner leur confiance avec de tels référentiels –et surtout savoir la conserver, l'authenticité doit être la priorité recherchée par la marque. Elle ne doit surtout pas essayer d’avancer masquée ou vouloir se donner une image éloignée de ce qu’elle est en réalité ; elle doit au contraire oser jouer la carte de la transparence et parler à chacun en personnalisant au maximum son message. Il est donc recommandé d’utiliser les données disponibles sur les médias sociaux afin de donner une dimension plus individualisée à la communication.
Bénéficier d’une réputation positive devient un des éléments clefs du dispositif qui permettra aux marques de remporter leurs faveurs. C’est pourquoi le community management va jouer un rôle essentiel pour maîtriser l’e-réputation de la marque et réussir à se rapprocher d’eux avec succès : savoir les écouter, être capable d’échanger avec eux, tenir compte de leurs avis et opinions... Ayant toujours connu Internet et ayant grandi avec le développement des réseaux sociaux, les jeunes sont tout sauf des récepteurs passifs ; ils sont souvent à l’origine des échos, des bruits et des informations qui vont faire de la marque ce qu’elle est.
Les jeunes sont créatifs mais ils ne cherchent pas à être révolutionnaires. De ce point de vue, ils s’inscrivent assez bien dans la continuité de ce que leurs aînés aimaient déjà faire, à savoir non pas casser les codes des marques mais plutôt les détourner. Ils les utilisent avec une logique positionnelle ou statutaire, que ce soit pour montrer leur appartenance à un groupe ou au contraire pour s’en démarquer. Les appareils électroniques digitaux où l’on recouvre la marque avec une coque customisée ou les vêtements qui sont ornés de logos ludiques – vrais ou faux – sont particulièrement prisés par eux. De la même façon, ils apprécient beaucoup de détourner le logo des marques qu’ils aiment bien. En laissant les jeunes faire ce détournement (mais en l’encadrant pour éviter un débordement qui deviendrait néfaste pour la marque) ou en créant une complicité par l’autodérision ou d’autres formes d’humour comme l’absurde, la marque bénéficie d’un capital de sympathie incontestable auprès de cette population.
Toutefois plusieurs études récentes pourraient donner aux marques des raisons d’être inquiètes puisque celles-ci semblent indiquer que les générations les plus jeunes sont de moins en moins fidèles aux marques. Si les marques stars (Apple, Nike, Adidas, Google, Samsung et Coca-Cola et Sony) changent assez peu au fil du temps et restent les marques préférées des jeunes depuis plusieurs années – avec des légères variations dans le classement d’une année sur l’autre, on doit se demander comment interpréter le fait que Xiaomi, entreprise chinoise d’informatique et d’électronique, a détrôné Adidas et Nike pour devenir la marque la plus importante pour les jeunes chinois.
Publié le mardi 07 mars 2017 . 6 min. 21
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