Lorsque les gouvernements s’impliquent dans les prix du marché à défaut de créer des bonnes conditions de marché comme le voudrait le libéralisme, ils jouent avec le feu. Les entreprises hésitent beaucoup à changer significativement et brusquement leurs prix car elles connaissent en général assez mal les réactions des acheteurs dont les signaux en retour sont souvent absents ou voilés pendant un certain temps, surtout en B to B, afin de sécuriser leurs approvisionnements. Ajuster son prix sur les variations de ses propres coûts, suppose que le marché de leurs achats et de leurs ventes suivent les mêmes comportements. Les prix du pain et du transport en sont deux exemples connus de tous.
Sur le pain, les assemblées questionnent et des libéraux vont même demander à l’Etat d’intervenir auprès des fournisseurs des boulangeries et de verser des compensations aux énergéticiens eux-aussi soumis au trading de l’énergie et aux règles européennes. La tentation interventionniste sur les prix est récurrente et risquée.
Le Journal of Economic Behavior & Organization de Novembre 2022 rappelle opportunément que la courbe de demande est coudée en chaque point, à savoir que l’élasticité à la hausse de prix diffère de celle à la baisse. Il y a fort longtemps Paul Sweezy avait développé et formalisé ce point dans un article fondateur sur la demande en oligopole mais qui est assez généralisable à d’autres situations de marchés. C’est le cas dans les transports par le métro à Londres. En effet, une baisse de prix attirera les voyageurs mais une hausse ne les fera pas fuir pour autant car les alternatives n’existent pas identiquement. Plus simplement, quand on peut se payer le taxi, on peut passer au prix du métro mais pas l’inverse.
En août 2022, les Etats-Unis lançaient leur plan « Inflation Reduction Act – IRA » de 370 milliards de dollars pour soutenir la transition énergétique. Cette action a été rapidement recadrée sur la question de la croissance et non de l’inflation. En effet, le libéralisme américain rechigne à intervenir concrètement sur les prix mais pas sur des actions keynésiennes de croissance par l’investissement.
C’est sans compter sur le fait que l’abandon d’un fournisseur jugé trop cher est progressif, en évitant les risques de rupture de fourniture et en réallouant progressivement les volumes. Parfois c’est une politique globale qui est en jeu : le NY Times du 1er septembre 2022 titrait, « Tech Companies Slowly Shift Production Away From China », en citant Apple, Microsoft, Amazon et le rôle croissant des fournisseurs du Viêt-Nam et de l’Inde. Dans ce cas, le mouvement est visible, mais à des niveaux plus réduits. Le management des approvisionnements ajuste donc l’élasticité au prix à la sécurisation de la fourniture. Il acceptera donc un léger surcoût pendant un certain temps pour ne pas mettre à risque la production et agira en conséquence avec un effet retard difficile à identifier mais qui, de par sa variabilité, viendra brouiller les calculs d’élasticité au prix.
Notre suggestion est très simple : inclure une procédure élémentaire de révision de prix en en discutant à froid avec le client. L’une des clauses efficaces est de n’intervenir que si la variation, à la hausse ou à la baisse, est supérieure à un certain pourcentage, introduisant un partage approprié du risque. Il faut essayer ce tunnel de prix, avant d’édifier des procédures d’ajustement complexes ou à l’inverse de tout improviser.
Publié le jeudi 23 janvier 2025 . 4 min. 37
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