Marseille est une ville complexe. Ville-monde, ville-frontière, ville-récit, elle ne se laisse jamais enfermer dans une seule définition. Son immensité géographique – deux fois et demi la taille de Paris – rend son homogénéité toujours problématique. Cité éclatée, mosaïque de villages, Marseille oscille entre des contrastes saisissants : les quartiers sud, entre mer et collines, plus bourgeois ; les quartiers est, marqués par un périurbain parfois indistinct ; les quartiers nord, avec leurs grands ensembles souvent réduits à la seule image des cités HLM.
Mais au-delà de ces fractures spatiales, Marseille est d’abord une unité imaginaire. Une ville qui dépasse sa réalité matérielle pour exister comme un topos, une légende vivante, nourrie par la littérature, le cinéma, le journalisme et la mémoire collective. Jean-Claude Izzo le résumait ainsi dans Chourmo :
“Marseille, c’est comme une boîte. Tu ne sais jamais ce qu’il y a dedans tant que tu ne l’as pas ouverte. Mais quand tu l’as ouverte, tu refermes pas.”
C’est précisément cette imprévisibilité, cette multitude d’histoires qui coexistent, qui font la force et la singularité de Marseille.
Un mode de scrutin qui pourrait changer, mais une ville qui reste insaisissable
Mais ce mode de scrutin est-il l’essentiel ? Même si la gouvernance changeait, Marseille resterait une ville multiple, paradoxale, insaisissable. Comme l’écrivent Michel Peraldi et Michel Samson (Sociologie de Marseille), Marseille n’est pas qu’une ville habitée, c’est une ville imaginée. Un espace où le mythe prend souvent le pas sur la réalité, où les récits de Pagnol, Guédiguian, Comolli et Izzo sculptent encore les représentations collectives.
Marseille est cette étoile dont on annonce régulièrement l’extinction économique, mais dont la lumière continue de briller, car elle appartient autant à ses habitants qu’à ceux qui la racontent.
Entre ville fantasmée et ville du quotidien
Toute la tension de Marseille réside dans cette opposition permanente entre ville fantasmée et ville du quotidien. D’un côté, une ville exaltée par les récits, les fictions, les représentations culturelles. De l’autre, une ville vécue, travaillée, éprouvée par ses habitants, avec ses infrastructures, ses inégalités, ses luttes sociales et politiques. Marseille se joue toujours entre ces deux dimensions, et c’est cette dualité qui fait sa singularité.
La ville vit, bouge, se transforme, mais son imaginaire ne doit pas être détruit. Si Marseille devait perdre son mythe, elle ne serait plus Marseille.
Publié le jeudi 24 avril 2025 . 3 min. 04
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