Espérée par les professionnels de l’immobilier, la poursuite de la détente des taux annoncée par la BCE le 12 décembre dernier est une véritable bouffée d’oxygène. Leurs espoirs : que l’Institution de Francfort ne s’arrête pas en si bon chemin et continue sur sa lancée en 2025. Coincée entre la nécessité de trouver un équilibre entre le soutien à la croissance et le risque de raviver l’inflation, la détente se poursuivra effectivement selon notre scénario à Xerfi mais peut-être pas de façon aussi marquée.
La baisse des taux : un espoir fragile
La baisse des taux, c’est actuellement l’alpha et l’oméga d’un marché immobilier où tous les autres paramètres ont viré au rouge : crise et instabilité politique, flou total sur la politique du logement à venir, inquiétudes montantes des ménages sur l’évolution du chômage et leur situation financière, enfin craintes d’un futur tour de vis fiscal. La coupe est pleine. Reste donc la réduction du coût de l’argent comme dernier levier pour sortir de la crise. Comme la Banque Centrale Européenne est lancée dans un cycle de détente monétaire, c’est gagné.
Pas si simple sauf pour les prêts à taux variable, mais ils représentent une part très faible de la production des crédits à l’habitat (environ 3% sur les 10 dernières années). C’est d’ailleurs un trait spécifique du marché français. Pour cette catégorie de prêts, le taux d’intérêt est périodiquement révisé en fonction d'un indice de référence, souvent lié aux taux interbancaires comme l’Euribor, c’est-à-dire le taux d’intérêt utilisé par les banques lorsqu'elles se prêtent de l'argent entre elles. Maintenant que la mécanique est engagée, les taux variables vont commencer leur décrue et poursuivront le mouvement en 2025. L’histoire n’est pas forcément la même pour les taux fixes.
La dette française : un cygne noir potentiel
Les crédits immobiliers à taux fixe sont généralement accordés sur des périodes longues (entre 15 et 25 ans). Pour ces prêts, les banques se financent souvent sur des marchés à long terme ou basent leurs prix sur des instruments financiers de durée similaire, comme les obligations d’État (les OAT) à 10 ans. Leur niveau et leur évolution sont liés en partie à la politique monétaire de la BCE. Mais d’autres variables sont en jeu comme les anticipations d’inflation, de croissance économique, le contexte géopolitique, le taux de change, les soubresauts des marchés financiers et la croyance plus ou moins grande des marchés pour un pays d’honorer ses engagements vis-à-vis de ses créanciers. Cela se paie par une prime de risque.
C’est là que la dette française pose problème et que l’imbroglio politique est une épée de Damoclès. Car si les agences de notation restent, jusqu’à maintenant, bienveillantes, les marchés financiers ont, eux, commencé à sanctionner l’économie française. Deux marqueurs : la bourse et le spread de taux entre la France et l’Allemagne. Cet écart de taux constitue un indicateur de choix pour mesurer la confiance accordée à la France face à l’Allemagne. Plus il est élevé, plus les investisseurs manifestent leurs inquiétudes vis-à-vis du pays. Signe des tensions récentes, le spread OAT-Bund, qui évoluait dans un tunnel compris entre 45 et 55 points de base depuis le début de l’année, s’est brusquement tendu depuis le 10 juin dernier, grimpant à plus de 80 points de base. Que le doute se distille un peu plus sur la capacité et/ou la volonté française à faire front à son endettement et les OAT repartiront à la hausse, emmenant les taux immobiliers, malgré la détente des taux courts pilotée par la BCE. La dette française pourrait bien être le cygne noir de l’immobilier.
Publié le mardi 17 décembre 2024 . 4 min. 39
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