Les associations jouent leur survie. Elles sont bousculées par la crise sanitaire et les gestes barrières qui s’accordent mal avec leur ADN : le lien et la proximité sociale. Le risque de collapsus en chaîne grandit pour ces organisations pourtant essentielles à la vie sociale, culturelle, sportive… et économique de dizaines de millions de Français.
Le monde associatif, un poids lourd économique. La France compte 1,5 million d’associations qui disposaient d’un budget cumulé de 113 Md€ en 2017. 10% ont la particularité d’employer des salariés… 1,8 million pour être exact. C’est colossal : c’est 10% des effectifs du secteur privé pour un budget de 98 milliards. Une grosse partie de ces établissements travaillent dans le médico-social et l’humanitaire et portent à ce titre les politiques publiques. A l’inverse, les 90% d’associations restantes, plus petites, n’ont pas de salarié et leur budget moyen est en général inférieur à 10 000 euros : ces sont surtout des associations de quartier qui proposent du sport, des activités culturelles, des loisirs... Leurs budgets cumulés avoisinaient 15 Md€ en 2017 et reposent largement, à l’inverse des plus grandes, sur les financements privés. Elles vivent surtout grâce à leurs membres qui donnent par ailleurs de leur temps pour les faire fonctionner. Et pas qu’un peu, puisqu’on estime que le volume de travail des bénévoles représente 1,4 million d’emplois en équivalent temps plein.
Mais les mesures sanitaires compliquent leur équation financière, notamment celle des plus petites. Celle-ci témoignent d’une baisse des adhésions en cette rentrée par peur de la propagation de la Covid-19 : sports en salles, sports de contact, associations de yoga ou de danses, chorales… Les incertitudes sanitaires poussent également les ménages aux revenus modestes à ne pas s’engager sur une cotisation annuelle. La diminution de la capacité d’accueil ou la limitation éventuelle des rassemblements par les Préfectures, propices à la vente de produits ou services, sonnent également comme un coup de grâce sur les finances de ces associations. Dernier problème : les bénévoles manquent à l’appel alors qu’ils sont essentiels à leur fonctionnement.
Un désastre économique et social se profile. Certes, les associations accèdent aux mêmes mesures de sauvegarde que les entreprises (PGE, chômage partiel, reports de charges…). Certes, il y a une enveloppe d’un milliard d’euros, surtout pour celles travaillant dans l’insertion professionnelle.
190 millions sont prévus pour les missions locales et les associations sportives à travers notamment des dispositifs d’aide à l’emploi pour les jeunes. Certes, État et collectivités ont promis de mettre la main à la poche pour les aider… Mais inévitablement l’argent va manquer pour payer les intervenants externes, les loyers, les manifestations, les équipements et les éventuels salariés... Faisons un rapide calcul pour les seules petites associations : si on estime à 30% la baisse des financements privés, hé bien il va manquer au moins 4 milliards d’euros pour boucler les budgets sur la base des données de 2017. Réduction de l’offre, annulation des rassemblements voire même licenciements… les associations vont devoir se mettre au régime sec et pour certaines se mettre en sommeil.
Après la crise, une autre crise menace. Celle qui procédera des changements d’habitudes et de comportements des Français : moins de bénévolats pour réduire les contacts, choix de sports individuels voire pas de sport du tout pour les familles modestes, essor des pratiques culturelles à domicile grâce au numérique. Au-delà du préjudice pour les associations sportives et culturelles, la désocialisation et le recentrage des Français sur le cocon familial nous poussent vers un terrain très glissant : celui d’une crise sociale profonde.
Publié le mercredi 30 septembre 2020 . 3 min. 47
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