La révolution numérique, on le sait, est dans toutes les têtes. Ceci est singulièrement le cas en matière d'éducation, sur fond de dématérialisation des contenus et de murs de la salle de classe qui vacillent sous le poids des plateformes type wikipédia ou de cette possibilité qui est désormais dans toutes les têtes : le cours ouvert, massif, on line. Le MOOC.
De manière surprenante, il est un acteur qui est précisément au coeur de cette révolution, qui la vit au quotidien, mais dont on parle finalement bien peu : le prof. Des classes primaires dotées de tableaux numériques interactifs aux projets gouvernementaux de voir chaque collégien, lycéen, étudiant doté d'une tablette, le changement ne peut pourtant qu'être radical pour la profession.
La pensée du grand sociologue allemand Max Weber en matière de sources de légitimité de l'exercice du pourvoir est-il d'une grande utilité pour penser les transformations qu'a connu ce beau métier de professeur et celles qui l'attendent. puisque, à quelque niveau d'enseignement que ce soit, un ou une prof sera toujours d'abord une figure d'autorité. Et que seuls quelques naïfs illuminés croient que demain un monde sans relations de pouvoirs, totalement horizontal, serait possible si l'on suit la pensée de ce philosophe que le monde nous envie : Michel Foucault.
Première source de légitimité au pouvoir, la tradition. Oui, il fut un temps pas si lointain où l'instituteur était encore Monsieur l'instituteur. Cet "idéal-type" pour reprendre weber n'a pas survécu à la mise en cause de toutes les formes de traditions depuis les années 1970.
C'est ainsi que le prof, de référence, est devenu ucoach. Le modèle rationnel-légal a gagné. L'éducation est devenue de moins en moins un devoir, de plus en plus un droit : celui à être préparé à un emploi futur, donc à affronter rationnellement l'efficience des marchés en général, et celle du marché du travail en particulier. Le savoir est devenu marchandise, et le diplôme passeport pour un salaire de sortie. Le tout sur fond de pensée chez les élites gouvernantes que le marché irait forcément de pair au niveau mondial avec la démocratie... On a vu ce qu'il en aura été de cette idéologie.
Alors que le mouvement vers l'horizontalité paraît irréversible, que les étudiants sont souvent mieux armés que leurs enseignants dans la maîtrise des outils techniques, cela semble étrangement appeler le retour sur le devant de la scène le retour du "professeur", avec un petit p.
Il est vrai qu'un professeur est toujours a minima un interprète. Et que pour peu qu'il en ait l'appétit ou que cela fasse partie intégrante de sa mission, comme dans l'enseignement supérieur, il est également auteur-compositeur, dans sa salle de concert : la salle de classe.
Paradoxe ultime donc : celles et ceux qui ont été les premières victimes des mises en cause des formes traditionnelles et rationnelles-légales de légitimiyé du pouvoir sont appelés à un un spectaculaire retour sur le devant de la scène puisque, plus que jamais, la technologie appelle le retour du spectacle vivant. Et qu'avec les innombrables véhicules d'interactions qui s'offrent à lui (blogs, médias sociaux, on en passe), les possibilités des artistes sont illimitées.
De temps en temps au service du grand nombre. À d'autres pour quelques heureux et heureuses élu(e)s, dans le cadre de concerts privés.
Publié le mardi 9 décembre 2014 . 3 min. 47
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de Jean-Philippe Denis
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