Les magasins et les écrans débordent de promesses de plaisirs alléchants, la consommation, toujours plus de consommation, est devenue la norme du plaisir et du bonheur. Le marketing façonne habilement nos désirs les plus profonds. La quête et l’accumulation de la marchandise, matérielle ou immatérielle structure nos vies, nos pensées.
Mais c’est un point de vue critique face à cette société d’hyperconsommation qu’analyse Benoit Heilbrunn dans son livre, Mystifications marchandes. Le sous-titre, des choses cachées depuis la fondation du marché, est révélateur de son intention. Il s’agit de démonter la machine du marché, DEMONTRER qu’un autre capitalisme est possible, et avec lui, un autre marketing.
Il est vrai que Benoit Heilbrunn se veut professeur CRITIQUE de marketing et de communication, une discipline qu’il enseigne à l’ESCP Business School. Mais il est aussi philosophe et sémiologue. C’est pourquoi il nous invite à démystifier le monde complexe du marketing et de la marchandise, en débusquant ses excès, ses contradictions. Mais il nous encourage aussi à partir à la recherche d’un monde meilleur ou le capitalisme ne serait plus le problème mais la solution.
Par une approche transdisciplinaire, Heilbrunn scrute les recoins de ce système, révélant les fondements parfois problématiques de l’échange, de la dette infinie, les pulsions destructrices, et les paradoxes inhérents du capitalisme. Chemin faisant, il déconstruit les idées reçues, mettant en relief le caractère paradoxalement romantique plutôt que matérialiste de la société de consommation. Mais il le fait sans esquiver les dilemmes éthiques posés par la fuite en avant dans la marchandise et ses signes.
Heilbrunn s’attaque bien sûr au marketing, cette superstructure de l’économie capitaliste au sens de Gramsci, qui reproduit à l’infini notre économie de consommation. Il nous incite à regarder au-delà des discours, des images, des packagings, des rayons, des vitrines, des écrans. Il démystifie le mythe de la dématérialisation, celui de l’économie circulaire, l’illusion de l’effet générationnel, la fausse couronne du consommateur-roi.
L’auteur met à jour les tactiques subtiles de la machine marketing, qui, de la stimulation de la frustration à l’instigation de la peur, entretient le cycle d’insatisfaction pour nourrir toujours plus de demande.
Mais ne croyez pas qu’Heilbrunnn rejette le capitalisme et le monde marchand. Bien au contraire, le capitalisme est pour lui, au travers de l’échange, un espace de dialogue et de liberté. L’optimisme, l’hédonisme alternatif, l’utilitarisme y sont envisagés comme des moyens de réorienter nos sociétés vers des formes plus vertueuses, basées sur des valeurs humaines et écologiques, où le profit ne serait plus le seul moteur de l’économie.
A travers ses chroniques Xerfi Canal, ici rassemblées dans un livre, Benoit Heilbrunn nous propose une exploration audacieuse, parfois paradoxale mais sans complaisance du monde de la marchandise. ET DU MARKETING. Nous ne sommes pas de simples victimes passives du système nous dit-il, nous avons le pouvoir de le changer harmonieusement. Les reproches cinglants à l’égard du marketing et de la manipulation des désirs sont un appel à reprendre, paisiblement, le contrôle de nos choix. Mais c’est aussi aux marketeurs de faire aussi leur autocritique. Un marketing responsable et rentable est possible.
Publié le lundi 11 décembre 2023 . 4 min. 53
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