L’enseignement, en France encore plus qu’ailleurs, accorde une place essentielle, dans l’évaluation et la sélection, aux capacités de mémorisation et de modélisation. Autrement dit, deux choses que la machine fait déjà bien mieux que nous. Ce constat en dit long sur l’urgence à rebâtir notre système éducatif face au contexte actuel d’envahissement technologique. Oui mais comment ? Tous ceux qui se posent cette question pourront trouver des réponses dans le livre « Apprendre au XXI? siècle » du biologiste François Taddei, par ailleurs spécialiste des questions d’éducation.

Un livre inspiré, entre autres, par la remarque d’un instituteur qui reprochait au fils de l’auteur de poser trop de questions en classe. Difficile vous en conviendrez à avaler pour un chercheur qui fait du questionnement la clé de voûte de son travail ! C’est d’ailleurs à partir de son expérience personnelle et de sa culture que François Taddéi formule des propositions très concrètes, dans un essai pas forcément très structuré (mais c’est souvent de ce type de démarche qu’émergent les meilleures idées).

Alors citons, en vrac : déjà, réhabiliter le questionnement, qui sous-tend l’ensemble de l’édifice à rebâtir ; le développement de l’empathie, puisque nous avons encore quelques années devant nous avant que la machine nous rattrape sur ce point ; le développement du  mentoring ; ou encore en finir avec l’année scolaire de septembre à juin. En effet, pourquoi ne pas laisser quelques mois de plus à ceux qui ne parviendrait pas à assimiler l’ensemble du programme sur cette période fixée ?

Une reconstruction de l’enseignement passerait aussi par un soin tout particulier à la petite enfance, là où tout se joue. C’est pourquoi il s’agirait d’autoriser la sieste chez les tout-petits à l’école (ce n’est aujourd’hui plus possible à partir de la moyenne section) pour favoriser leur assimilation de compétences car la recherche a prouvé depuis longtemps que, mieux reposé, on apprend tout simplement mieux ! D’ailleurs, en ce sens, François Taddéi propose, et c’est relativement original, de prévoir un budget public de R&D dans l’Éducation nationale.

Un autre message important du livre concerne l’importance de désiloter les disciplines. Pour nous expliquer la pertinence de cette transdisciplinarité, François Taddéi reprend une image toute simple, qui lui est chère, tirée d’un vieux conte indien : dans celui-ci, 7 aveugles se demandent à quoi ressemblent un éléphant. En touchant 7 parties du corps d’un spécimen, ils parviennent ensemble à reconstituer l’ensemble ; Donc Transdisciplinarité, puisque chacun détient une part de vérité, mais aussi intelligence collective, puisque ce n’est qu’ensemble que les 7 aveugles parviennent à se rendre compte de la réalité.

Reste maintenant à mettre toutes ces propositions en musique, au sein, suggère-t-il, d’un grand « service public de l’apprendre » qui ne doit en rien être un système inspiré de l’Éducation nationale. Et connaissant les capacités de résistance du système actuel (Taddéi en sait d’ailleurs quelque chose), c’est probablement et malheureusement là sa proposition la plus utopique…