En France, la R&D des entreprises bénéficie d’un puissant moteur : le crédit impôt recherche, le CIR. Mais s’il s’agit là d’un système déclaratif soumis à contrôle, un contrôle qui peut parfois dissuader les chefs d’entreprises d’y recourir. C’est pourquoi il convient de bien sécuriser la démarche. Alors pour parler des fondamentaux à respecter, Xerfi Canal a reçu Bruno Coulmance, directeur du Département Financement de l’innovation, Alma Consulting Group.
Alors quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour sécuriser son CIR ?
Et bien je vois trois fondamentaux à respecter : d’abord anticiper, ensuite analyser et valoriser, et enfin justifier son CIR. Ces bonnes pratiques doivent permettre de lever les craintes sur le contrôle. C’est d’autant plus important que ce dispositif est la clé de voûte du financement de la R&D du secteur privé en France avec plus de 19000 déclarations par an et plus de 5 milliards d’euros alloués aux entreprises chaque année.
J’en reviens aux fondamentaux que vous avez évoqués. Le premier, anticiper….Vous entendez par là le travail préparatoire en amont du projet ?
Tout à fait. Le CIR ne s’improvise pas. Anticiper permet à l’entreprise d’adopter une démarche réfléchie et construite, ce qui lui évitera de perdre du temps et de l’argent en cas de contrôle fiscal. L’entreprise doit considérer le CIR comme un véritable projet avec des objectifs, une planification, des deadlines, des comptes rendus les retours d’expérimentation...La sécurisation du CIR nécessite également la mise en œuvre d’une démarche systématique de veille technologique intégrant une étude complète sur l’état de l’art afin de s’assurer qu’on ne réinvente pas la roue ! Enfin, toujours en amont, il faut bien s’assurer d’être en mesure de collecter, au fur et à mesure, toutes les données qui permettront de suivre les temps passés par les équipes de recherche et l’ensemble des dépenses relatives au CIR.
Vous disiez il y a un instant qu’il fallait s’assurer qu’on ne réinvente pas la roue… Que voulez-vous dire ?
Oui, c’est là que se situe le cœur du dispositif du CIR ou encore la deuxième étape fondamentale que j’évoquais : analyser et valoriser. Analyser si les projets sont éligibles, autrement dit, être sûr qu’on est bien dans une démarche de R&D, et pas simplement d’innovation en mettant en évidence les verrous et incertitudes technologiques qui dépassent le cadre de l'état de l'art. Je rappelle simplement qu’une démarche de R&D se caractérise par la formulation d’hypothèses que le scientifique cherche à vérifier selon un schéma itératif.
Comment s’assurer ensuite que le montant du CIR est bien calculé ?
Pour cela, il faut savoir parfaitement maitriser les règles de prise en compte et de calcul des dépenses qui constituent l'assiette de R&D pour éviter les difficultés réglementaires inhérentes au dispositif. Car, même si l'assiette de calcul du CIR ne comporte qu’une quinzaine de postes de dépenses, le dispositif est plus complexe qu’il n’y paraît dans son application en raison de la documentation règlementaire qui est conséquente. Et puis, il faut également souligner une autre difficulté, celle liée à l’instabilité règlementaire. Personnellement, j’accompagne les entreprises depuis plus de 15 ans et je n’ai jamais connu une année sans évolution du dispositif que ce soit dans les principes de calcul ou la nature des dépenses éligibles.
Alors comment se prémunir face à ces difficultés ?
On se prémunie lorsque l’on sait justifier son CIR, c’est le troisième pilier de la démarche. Justifier le CIR, c’est collecter et conserver absolument toutes les preuves de dépenses et de R&D : temps passés, factures, CV, rapports techniques, etc… Il faut aussi, pour éviter les mauvaises surprises, bien s’assurer de suivre la trame institutionnelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche pour présenter les projets. Cette présentation doit être focalisée sur les problématiques scientifiques du projet et non sur les nouveautés fonctionnelles, sinon on en revient à une simple démarche d’innovation. Enfin, l’entreprise doit adopter une démarche de justification en temps réel a priori ou au moment de la déclaration. Pas au moment du contrôle, qui peut intervenir jusqu’à plus de trois ans après l’accomplissement des travaux de R&D. A noter, qu’il existe également une démarche alternative de sécurisation de son CIR = la procédure de rescrit qui permet au contribuable de faire valider a priori de la déclaration l’éligibilité des projets retenus
Le respect des fondamentaux pour sécuriser son CIR permet de ne pas se priver de cet outil de soutien à l’innovation. Un outil d’autant plus précieux qu’il est unique au monde, puisqu’il conjugue à la fois un niveau d'intensité d'aide élevé sans être plafonné et la possibilité d’obtenir la restitution des montants déclarés si l'imputation sur l'impôt société n'est pas possible.
Bruno Coulmance, Sécuriser le CIR : 3 fondamentaux pour réussir, une vidéo Xerfi Canal
Publié le mardi 2 septembre 2014 . 5 min. 21
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