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Il y avait bien longtemps que le Japon n’avait pas connu un tel cycle inflationniste. Mais une hausse des prix à la japonaise. Avec un maximum de 4,3% en janvier 2023, le pic a finalement été très modeste par rapport à ce qu’ont vécu les autres grandes économies avancées et le soufflé est retombé depuis. Pas assez toutefois pour la Banque centrale (BoJ). À 2,4%, sans tenir compte des produits frais, l’inflation dépasse pour le 30ème mois consécutif sa cible de 2%. La BoJ ne pouvait rester sans réaction et c’est pourquoi, après avoir mis fin à ses taux négatifs en mars dernier, elle a relevé son taux directeur plancher de 0,1% à 0,25% en juillet dernier. Ce mouvement marque le début d’une normalisation progressive de la politique monétaire japonaise. Toutefois, en raison de l’historique de déflation du Japon, la Banque centrale agira avec prudence, et les prochaines hausses seront conditionnées par la vigueur et la durabilité des revalorisations salariales en cours.


Défis démographiques


Jusqu’en juin dernier, la course poursuite entre l’indice des prix à la consommation et celui des salaires était systématiquement perdue par ce dernier. Depuis, les salaires réels augmentent plus rapidement. Ce regain de pouvoir d’achat pourrait redresser le moral des ménages en perte de confiance et relancer leurs achats. La consommation restée modérée au 1er semestre 2024, devrait se redresser progressivement au second semestre 2024. Bienvenue, ce sursaut conjoncturel s’inscrit néanmoins dans une tendance beaucoup plus défavorable en lien direct avec le vieillissement accéléré du pays.


En cause, un déficit de naissance dont l’un des marqueurs est l’affaissement du taux de fécondité. Tombé en dessous du seuil de renouvellement des générations depuis des années, il est descendu à 1,2 enfant par femme. Trop peu de bébés face à un nombre de décès en progression, le solde naturel a viré au rouge et le pays se dépeuple depuis 2008 d’autant plus qu’il a fermé les portes à l’immigration. Ce vieillissement démographique génère un cercle vicieux.


Conséquences sur l'emploi et la productivité


Premier volet : les besoins de consommation et de logements, notamment leurs composantes incompressibles, sont indexés sur la dynamique de la population totale. Les achats des ménages stagnent ainsi depuis des années. Quant à la construction neuve, le dépeuplement n’explique pas tout. Le contexte économique, financier, la sur-construction héritée des périodes d’euphorie immobilière sont aussi à intégrer dans l’équation.


Second volet, la capacité à produire des richesses est en partie indexée sur le réservoir de la population en âge de travailler. Moins de naissances aujourd’hui, c’est moins de travailleurs demain. C’est le second coup de couteau dans la capacité du pays à générer des richesses. Directement parce que la population active diminue. Indirectement parce qu’elle vieillit et fait fléchir la productivité.


S’adapter et innover face au déclin démographique


Cet environnement n’est favorable ni à l’investissement des entreprises locales ni aux investissements directs depuis l’étranger. Les deux s’affaiblissent et viennent saper la productivité et la croissance passée d’un rythme de progression de 4,5% l’an dans les années 80, à 1,1% dans les années 90 pour terminer à 0,5% environ depuis le début des années 2000. Compte tenu d’un début d’année catastrophique, 2024 s’annonce même en baisse.


Toutefois, rapportée à l’évolution de sa population, la performance japonaise reste remarquable. Le pays joue sur deux paramètres :


• Le report de l’âge de départ à la retraite pour augmenter le réservoir de main d’œuvre disponible. Les droits à pension y sont aussi plus faibles, ce qui contraint les retraités à rester en activité, même pour des emplois dégradés. De fait, le Japon a un taux d’emploi des 55-64 ans singulièrement élevé et même au-delà sur la tranche des 60-69 ans.
• Deuxième paramètre, investir massivement dans la R&D, les nouvelles technologies, la robotisation, la qualité du système éducatif pour tenter de maintenir une productivité en hausse malgré le vieillissement de la population.


Les soubresauts conjoncturels ne doivent pas faire oublier que déclin démographique et économique sont liés. Longtemps deuxième puissance économique, le Japon s’est fait successivement débordé par la Chine en 2010, l’Allemagne en 2023 et l’Inde est en embuscade.


Publié le vendredi 08 novembre 2024 . 4 min. 25

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