Pour les élus locaux, ils ne sont pas le problème des comptes publics car la loi les contraint à boucler des budgets à l’équilibre, où les dépenses de fonctionnement ne peuvent jamais dépasser les recettes. Preuve en est : ils dégagent une épargne brute solide, encore près de 40 milliards d’euros en 2024.
Toutefois, après l’intégration de leurs dépenses d’investissement, les comptes virent au rouge et laissent apparaître un besoin de financement, c’est-à-dire un déficit. Et c’est là que le bât blesse. Il atteint un record historique en valeur absolue et, rapporté au PIB, son niveau est inédit depuis le début des années 1990. Parce que les collectivités investissent beaucoup, mais aussi parce que leur épargne brute s’assèche.
En cause : un « effet de ciseau » classique, avec des dépenses de fonctionnement qui augmentent plus rapidement que les recettes. Pour combler le déficit, nul autre choix que d’emprunter toujours plus. Résultat : l'encours de la dette dépasse désormais 260 milliards d’euros. Bref, les collectivités participent directement à la dégradation des finances publiques.
À cela s’ajoute une présentation un peu fallacieuse de leur équilibre budgétaire. Car si elles ne peuvent pas s’endetter pour fonctionner, elles perçoivent de l’État, qui lui s’endette, plus de 150 milliards d’euros de transferts par an.
Cependant, leur faire un procès en mauvaise gestion est un peu rapide aussi. Côté recettes, la montée en puissance des transferts financiers de l’État vers les collectivités locales s’inscrit dans un vaste mouvement de déterri to ria lisation de leurs recettes, piloté par l’exécutif. Suppression de la taxe professionnelle en 2010, puis récemment, suppression progressive de la taxe d’habitation sur les résidences principales, suivie de la réduction de moitié, puis de la suppression totale, des ressources issues de la CVAE, désormais totalement absorbée par le budget de l’État.
L’incidence de cette modification de la structure de financement est de trois ordres. D’abord, certains montants des dotations ont été gelés à la date de leur mise en œuvre, et sont donc rongés par l’inflation. Ensuite, les impôts nationaux sont devenus essentiels au bon fonctionnement des collectivités. C’est une perte d’autonomie, surtout l’assiette n’est plus la même et est devenue plus dépendante de la conjoncture. C’est le cas du reversement de 25,5 % des recettes de TVA, très sensibles à l’évolution de la consommation en valeur. Or, elle cale. Enfin, le pouvoir fiscal des collectivités locales s’est retrouvé recentré sur l’immobilier (avec les frais de notaire notamment), or le secteur est en crise.
Le coup de frein des recettes n’est pas du fait des collectivités locales, il leur échappe largement. Côté dépenses, l’essentiel de leur alourdissement historique, que ce soit en % du PIB ou du total des dépenses publiques, est lié aux transferts de compétences de l’État vers les collectivités, notamment dans le cadre des lois sur la décentralisation.
En revanche, alors que la tendance était à l’allègement, la situation s’est brutalement retournée. En cause principalement : la hausse des frais de personnel. L’État est en partie responsable, en raison de l’augmentation du point d’indice décidée par le gouvernement. Mais cela n’explique pas tout. Le gonflement des effectifs ces dernières années, sans qu’aucun transfert significatif de compétences n’ait eu lieu, en est une autre. Les élus locaux sont loin d’incarner la rigueur budgétaire qu’ils revendiquent, mais les désigner comme co-auteurs majeurs de la dérive des finances publiques est pour le moins excessif.
Publié le mardi 13 mai 2025 . 3 min. 40
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