L’hypercompétition caractérise des secteurs où la concurrence est acharnée et où toute situation de leadership peut être remise en cause. Cette notion a été popularisée en 1995 par Richard d’Aveni, professeur de stratégie à la Tuck School of Business dans l’État du New Hampshire. Cette situation correspond à des univers turbulents marqués par une transformation constante et rapide des règles du jeu concurrentiel. Dans ces univers, les frontières des secteurs deviennent poreuses, l’identité des rivaux et des partenaires évolue constamment, les business models les plus robustes sont bousculés, les actifs stratégiques brutalement dévalorisés, et l’innovation permanente. En résumé, les avantages concurrentiels chers à Michael Porter deviennent instables et transitoires et les leaders peuvent à tout moment être détrônés.
Mais quels sont donc les facteurs qui contribuent à l’hypercompétition ?
• Il y a d’abord la mondialisation qui a bouleversé les règles du jeu traditionnelles de la concurrence. Une mondialisation qui a notamment facilité l’accès aux capitaux et modifié les chaînes de valeur, la structure des coûts de production, la disponibilité géographique des compétences, la concurrence fiscale ou encore la géographie des marchés.
• 2e cause : l’accélération des innovations technologiques qui provoque une obsolescence rapide des offres. Or, c’est précisément ce raccourcissement du cycle de vie des produits qui remet en cause la pérennité de l’avantage concurrentiel : il accroit en effet la menace de substituts et de nouveaux entrants et anéantit des années d’efforts pour abaisser les coûts de production. Ce foisonnement technologique autorise d’ailleurs aussi de nouvelles approches stratégiques comme les offres low-cost ou les modèles de plateformes. Des plateformes qui s’immiscent dans des tas de domaines (hébergement, livraison, distribution, travail indépendant…), qui soit ébranlent les leaders en place, soit disparaissent très vite, faute d’une audience ou d’effets de réseau suffisants.
• La troisième cause est à chercher du côté de la demande. En effet, sous l’effet de l’évolution technologique, mais aussi des coûts de production et des prix, de l’influence des marques, des phénomènes de modes, le comportement des consommateurs se modifient. Mieux informés, ils peuvent être plus exigeants, moins prévisibles et en attente d’instantanéité. Dans le même temps, des phénomènes de comportements grégaires peuvent bousculer un marché. On pensera ici, entre autres, à l’influence croissante des réseaux sociaux. Ainsi, le numérique a contribué à recomposer les offres, mais ce sont bien les consommateurs qui redéfinissent les usages ce qui contribue à cette hypercompétition.
Dans un univers hypercompétitif, il n’est plus question de bâtir des barrières à l’entrée insurmontables et des forteresses inattaquables pour se forger un avantage concurrentiel. Il s’agit plutôt de déstabiliser ses concurrents pour les réduire à un rôle d’imitateur et de suiveur, de les entraîner dans une course effrénée et de leur dicter de bout en bout le rythme de cette course, quitte à remettre en question sa propre stratégie. Les rentes de monopole ne sont que transitoires, et pour être rentable, une entreprise doit toujours avoir un coup d’avance. Le marché du smart phone, avec la guerre permanente entre Apple, Samsung, Huawei, Sony et bien d’autres illustre assez bien une situation d’hypercompétition où les leaders d’autrefois comme Blackberry, Nokia, Ericson ont été balayés…et oubliés !
Publié le mercredi 17 avril 2019 . 3 min. 50
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