Cette corde autour du coup des ménages les plus modestes les étranglent : cette corde ce sont les dépenses pré-engagées et les nouveaux besoins liés aux évolutions des standards de vie.
Équipement du logement et transformation du panier alimentaire
Première dépense incontournable : le logement et les charges attenantes comme l’eau ou le chauffage. Son poids dans le revenu des ménages est passé de 9% au début des années 60 à près du quart aujourd’hui. Un gonflement qui a accompagné l’amélioration considérable du confort notamment du confort sanitaire de base : l’eau courante, les WC à l’intérieur, la baignoire ou la douche, équipe aujourd’hui la totalité des habitations alors qu’à la fin des années 70, un logement sur quatre n’avait ni baignoire ni douche, et un sur quatre aussi manquait de toilettes à l’intérieur. À cela, s’est ajoutée l’augmentation de la surface moyenne et du nombre de pièces disponibles par personne avec à la clé une nouvelle norme : une chambre par enfant. Des logements qu’il faut bien équiper. Qui se passe aujourd’hui d’un réfrigérateur, d’une cuisinière, d’une télé, d’un lave-linge ou d’un aspirateur ? Personne ou presque. Les taux d’équipement pour tous ces appareils dépassent 90%. C’est peu dire que ces évolutions pèsent sur le budget des ménages les plus modestes.
Deuxième poste fortement contraint : l’alimentaire. La tendance à la baisse du poids de l’alimentaire au fil du temps et de l’élévation des revenus, plus connue sous le nom de la loi d’Engel, c’est brutalement interrompue il y a dix ans. La faible hausse du revenu sur la période a certainement joué, mais pas seulement. Il y a d’abord la transformation de la composition du panier alimentaire : les produits bruts ont cédé du terrain aux produits transformés et aux plats préparés plus chers, une adaptation rendue nécessaire par les changements de modes de vie qui s'est accompagnée d'une réduction du temps de préparation des repas à domicile. Puis c’est aujourd’hui la montée du bio avec le développement d’une éthique alimentaire qui s’impose à tous. Mais cela à un coût. Selon l’étude annuelle de Familles rurales, manger 400 grammes de fruits et légumes tous les jours, comme le préconisent les autorités de santé, coûtera 110 euros chaque mois à une famille de quatre personnes qui se dirigent sur les premiers prix, contre 130 euros pour une famille qui privilégie les aliments français et 240 euros, pour le panier bio soit un surcoût de près de 130 euros par rapport aux prix les plus bas.
Dépenses incompressibles : 75% du revenu des familles modeste
Troisième poste à scruter, l’automobile. Pour certains c’est un choix pour d’autres une nécessité. Les communes les moins denses notamment ne disposent pas ou de peu de services, d’équipements, de commerces et sont également moins bien desservies par les transports collectifs. La voiture n’a pas d’alternative et la multi-motorisation s’est généralisée. En reprenant les chiffres de l’INSEE, les ménages consacrent en moyenne 10% environ de leur revenu à l’automobile, soit un peu moins de 5 000 euros par foyer, l’équivalent de 400 euros par mois dont 281 liés simplement à l’utilisation du véhicule avec des écarts considérables du taux d’effort entre les zones rurales et les grandes agglomérations.
Dernier poste, les télécommunications au sens large. Cela passe par les abonnements en cascades mais aussi par l’acquisition du matériel. Selon une étude réalisée pour Sofinco, le budget technologie annuel moyen des Français pour ces outils indispensables au quotidien est de 411 euros par an dont l’essentiel est consacré aux abonnements.
Toutes ces factures sont à empiler et à mettre en face du revenu disponible (c’est-à-dire après impôts directs et ajout des prestations sociales). Le bilan est implacable : les dépenses incompressibles représentent 75% du revenu des familles modeste et 67% de celui des familles de la classe moyenne. Bref, il ne reste rien ou pas grand-chose pour les loisirs, la culture, la constitution d’un patrimoine d’où le sentiment très fort d’être pris à la gorge.
Publié le mercredi 6 février 2019 . 4 min. 14
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d'Alexandre Mirlicourtois
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