La baisse des taux. Une évidence… pas si certaine, et pour le pire pour l’économie française. Reflux de l’inflation aidant, la BCE, a desserré son étreinte et son principal taux est passé de 4% en mai 2024 à 2,5% en mars 2025. Cette détente devrait se poursuivre, mais à vitesse réduite. En cause, la folle remontée des droits de douane imposée par Donald Trump et les répliques qui ne manqueront pas de venir de la Chine, de l’Union européenne, du Japon même si le repli du cours du pétrole viendra en atténuer les effets. En théorie la baisse des taux courts entraîne celle des taux longs. Ce n’est pas le scénario privilégié. Notre hypothèse est plus celle du creusement de l’écart entre les taux longs et courts, c’est-à-dire une repentification de la courbe des taux. En toile de fond, l’incertitude extrême entourant le contexte international dont le prix est une prime de risque plus élevée exigée par les investisseurs.
L’Europe face à une pression obligataire inédite
En Europe, trois facteurs viennent amplifier la pression. 1- la BCE a cessé ses achats des obligations d’État depuis décembre. Or, ils avaient constitué un soutien à la demande qui avait permis de contenir les taux de rendement exigés sur ces titres. 2- Ensuite, l’Allemagne a lancé un vaste plan d’investissement de 500 milliards d’euros en partie financé par la dette. Résultat, le taux souverain allemand s’est envolé entraînant les taux espagnols, français, italiens. Enfin, dernier élément, le plan Readiness ex ReArm Europe de 800 milliards d’euros pour se réarmer dont une partie sera financée par la dette.
La France sous le feu des marchés
Sur le plan national, la France est dans le viseur des agences de notation, mais aussi des marchés financiers. Cette défiance est palpable à travers le creusement de l’écart entre les deux indices phares des bourses de Paris et de Francfort par exemple. Même constat sur le marché obligataire. La différence entre les taux souverains français et allemands qui évoluait dans un tunnel compris entre 45 et 55 points de base, s’est brusquement tendue grimpant à plus de 80 points de base. Encore proche de 0 en 2021, les taux longs français s’élèvent depuis. Ils devraient en moyenne atteindre 3,3 % cette année.
Avec cette première conséquence de mettre la pression sur le budget. Pour 2025, la France prévoit d’émettre environ 300 milliards d’euros de dette, emprunts qui seront soumis à des conditions de marché plus dures. Alors que l’État français a versé 59 milliards d’euros d’intérêts en 2024, ce montant devrait atteindre 67 milliards cette année selon les estimations de Bercy, c’est-à-dire plus que le budget de l’éducation nationale et la projection pour 2028 frôle les 100 milliards. Si le recours à la dette devient insoutenable deux leviers restent : augmenter les prélèvements obligatoires, mais le consentement à l’impôt atteint ses limites ; et/ou couper dans les dépenses. La hausse des taux va précipiter l’heure des choix.
Immobilier et entreprises, les autres victimes collatérales
Autre grand perdant de la séquence : l’immobilier-construction. Les taux fixes des crédits à l’habitat sont étroitement liés aux OAT. Une trop forte remontée risque bien de tuer dans l’œuf la sortie de crise. La contamination ne s’arrête pas là, les entreprises voient également leur condition de financement se dégrader et c’est l’investissement qui trinque et en bout de chaîne et l’activité souffre. Avec la hausse des taux le réveil est brutal, les fragilités de la France apparaissent au grand jour.
Publié le mercredi 09 avril 2025 . 3 min. 39
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