Moins d’augmentations, plus de frustrations, 2025 ne s’annonce pas exceptionnel pour les cadres. Premier coup dur : le basculement du marché du travail. Ce n’est pas Waterloo, mais les cadres ne sont plus les maîtres du jeu. Trois indices. Le taux d’emplois vacants dans les services à forte valeur ajoutée, dans la finance, l’information-communication où se concentre une grande partie de l’emploi cadre, baisse depuis plusieurs mois. Cela montre que les besoins des entreprises sont comblés plus facilement, autrement dit, les tensions s’apaisent et ont quasi disparu. Cette donnée vient en complément d’une autre : de moins en moins de recruteurs font état de difficultés à trouver un candidat « cadre » à l’embauche, et finaliser des projets de recrutements s’avère moins complexe. Enfin, côté volumétrie, les intentions d’embauche ont continué de diminuer avant l’été, et elles n’ont jamais été aussi basses depuis décembre 2020, date du début de la mesure. Une fois n’est pas coutume, la moyenne a du sens. Le fléchissement concerne les grandes entreprises et ETI : moins d’une sur deux projette de recruter, comme les PME et TPE.
L’incertitude économique pèse sur l’emploi des cadres
Le scénario d’une réduction de la dynamique des recrutements de cadres se précise, et l’on perçoit mal comment la vapeur pourrait s’inverser en 2025, compte tenu de l’environnement fiscal, économique et financier dans lequel vont évoluer les entreprises. Depuis l’annonce de la dissolution le 9 juin, les chefs d’entreprise naviguent dans le brouillard le plus total. Le discours de politique générale du Premier ministre n’a levé qu’une partie du voile, et les discussions s’annoncent houleuses entre le nouveau gouvernement et l’opposition. Il ressort néanmoins que si les grandes entreprises de plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires seront mises à contribution via une surtaxe sur les bénéfices, les ETI et les PME seront aussi concernées, avec principalement : la refonte des allègements de charges sur les bas salaires, la prise en charge par les entreprises, via une hausse des mutuelles, de l’abaissement de la couverture santé, et la réduction des aides à l’apprentissage. Des coûts en plus, ce sont des marges de manœuvre en moins pour investir, embaucher, rémunérer le personnel.
Or cela va arriver à un moment où la pression est déjà mise sur le taux de marge des sociétés, descendu à un niveau inquiétant. En face, le nombre de défaillances ne cesse de grimper, et la faiblesse des perspectives de croissance ne laisse pas entrevoir autre chose que la consolidation de cette tendance sans échappatoire possible. C’est un vent contraire de plus. Ce sont autant d’opportunités de créations de postes qui disparaissent, et avec elles aussi les opportunités de mobilité externe. La réforme des retraites complique de surcroît la situation en contraignant nombre de seniors à rester en activité. Bref, les opportunités de mobilité externe comme interne vont se réduire, or il s’agit de la voie royale pour être augmenté.
Des augmentations au ralenti
Enfin, c’est aussi une histoire de calendrier. Les négociations salariales annuelles pour 2025 s’ouvrent au moment même où l’inflation est tombée à 1,2% : Groupama a ainsi annoncé une augmentation générale de 1% pour l’année prochaine. Une chose est sûre, les budgets 2025 seront inférieurs à ceux de 2024 et il n’y en aura pas pour tout le monde. Toutes ces évolutions ne sont pas favorables et viennent se plaquer sur une tendance au ralentissement du salaire mensuel de base des cadres déjà perceptible dans les chiffres. Alors, certes, cette donnée n’intègre pas les primes et les heures supplémentaires, mais compte tenu de l’évolution de l’activité et de la dégradation de la santé financière des entreprises, elles vont être soumises au régime sec, tout comme les versements de prime de partage de la valeur avec un dispositif en outre moins incitatif.
Cerise sur le gâteau, les journées de télétravail auxquelles les cadres sont particulièrement attachés sont de plus en plus remises en cause. Ce n’est peut-être pas le retour au tout présentiel, mais la pratique sera beaucoup plus encadrée. Bref, c’est vraiment la fin de la période dorée pour les cadres.
Publié le lundi 21 octobre 2024 . 4 min. 03
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