Xerfi Canal a reçu E.M. Mouhoud, professeur d’économie à l’université Paris Dauphine et directeur du Groupement de Recherche International du CNRS DREEM (Développement des recherches Economiques Euroméditerranéennes)
Les propositions pour réindustrialiser le pays se réduisent aujourd’hui aux seules mesures protectionnistes, de l’avis d’Elias Mouhoub Mouhoud. Certes, la désindustrialisation de la France est préoccupante, l’industrie ne représentant plus qu’environ 14% de la valeur ajoutée. En fait, la désindustrialisation est liée aux progrès techniques, aux gains de productivité, à la hausse de la demande de services mais aussi à la concurrence internationale entre pays industrialisés et non aux délocalisations. Les délocalisations détruisent marginalement des emplois en France, même si leur impact peut être très important dans certaines régions françaises. En réalité, les travailleurs peu qualifiés sont les moins mobiles car ils dépendent de réseaux sociaux locaux et familiaux. Augmenter la taxe à l’entrée sur certains produits importés ne règlerait pas la situation, selon le professeur d’économie. Quant aux relocalisations constatées ici ou là, elles sont liées à l’automatisation de la production, à l’imperfection de certains produits fabriqués hors de nos frontières, au coût du transport et aux revalorisations salariales de certains pays d’Asie. Autrement dit, les primes à la relocalisation ne sont pas décisives dans le rapatriement de la production, en particulier pour les entreprises qui ont des stratégies de marges. En réalité, les entreprises qui continuent à délocaliser sont celles qui fabriquent des produits peu pondéreux. Pour 10 emplois détruits par les délocalisations, un seul emploi est relocalisé. Dans ce débat sur la réindustrialisation de la France, les services (qui représentent deux tiers des emplois du pays) sont souvent oubliés. Si on mesure les performances de ces services sur les territoires en les classant en six grandes catégories, on obtient une cartographie des emplois de services très instructive. On observe par exemple que les services collectifs et immatériels (36% des emplois en France) sont complémentaires à de nombreuses activités. Des villes comme Nantes ou Rennes sont alors réévaluées. On constate également que certaines régions, où les services supports (call centers…) qui pèsent environ 6% des emplois en France sont importants, vont subir un choc sérieux à l’avenir. Pour avoir une politique industrielle digne de ce nom en France, il est urgent de prendre les services en considération. Pour favoriser la mobilité du travail des zones touchées par les délocalisations vers les zones qui, au contraire, sont confrontées à des difficultés de recrutement dans certains secteurs et métiers, il faut concentrer les aides sur les personnes et les infrastructures du territoire, et non sur les entreprises.
E.M. Mouhoud, Réindustrialisation et relocalisation, une vidéo Xerfi Canal.
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