Xerfi Canal présente l'analyse de Jean-Baptiste Bellon, directeur de Trapeza et conseiller auprès de Xerfi
L’éditorial du journal Le Monde du lundi 9 avril lance un appel aux banquiers : existe-t-il des banquiers citoyen prêts à faire leur travail, c'est-à-dire prêter aux PME, qui font les investissements qui feront les emplois de demain. C’est un sujet qui fâche, surtout au lendemain des 1000 milliards d’euros à 3 ans apportés aux banques par la BCE : pourquoi est ce que les banques ne prêtent pas facilement aux PME ?
Les observateurs soulignent que le dispositif de médiation du crédit instauré fin 2008 pour aider les PME et les TPE a traité plus 15 000 dossiers avec succès ce qui a pérennisé plus de 250 000 emplois. C’est un travail indispensable pour maintenir la qualité du tissu économique, mais peu visible en chiffres globaux car 3 Mds€ en plus de 3 ans c’est 1.5% des crédits aux PME.
La relation entre les PME et leurs banques est au cœur du développement économique, car contrairement aux grandes entreprises, les PME vont chercher l’essentiel de leurs financements auprès des banques. De plus les PME sont dépendantes de leurs banquiers, elles sont assez peu diversifiées, elles utilisent en moyenne 2 banques. Les conditions appliquées par les banques sont donc cruciales et celles-ci se durcissent aujourd’hui, comme le montre les derniers résultats de l’enquête trimestrielle sur le crédit. En France comme en Europe une majorité de banque s’attend à un durcissement des conditions de crédit pour le T1-2012.
Les banques durcissent leurs conditions en ce moment car avec la stagnation économique de la zone euro pour 2012 (croissance du PIB réel de -0.1% selon la CE), leur appréciation du risque se dégrade. Ici entre en jeu « la boîte noire » de Bâle 2 ou de Bâle 3, la réglementation demande plus de capital pour des expositions risquées et sur la base des données des banques européennes, un crédit à une PME va demander 2 à 3 fois plus de capital qu’une grande entreprise, en raison de probabilité de défaut plus élevée. Ce lien entre risque et capital peut paraître logique, mais il entraîne une forte pro-cyclicité des ratios de fonds propres. Plus les temps sont durs, plus les banques consomment de capital pour détenir le même portefeuille. Ceci ne peut amener que deux réponse de la part des banques, soit augmenter les marges sur les crédits aux PME pour compenser cette charge supplémentaire en capital, soit accorder moins de crédits ; devinez….
Mais s’il est logique d’intégrer un risque statistique dans la détermination de la marge d’un crédit, est-il logique de lier aussi le capital ? La marge de la banque fait face à un risque probable, une perte attendue moyenne que les modèles savent approcher, cela est juste. Par contre le capital est là pour faire face aux risques inattendus et les leçons des crises passées sont là pour monter que l’on ne sait pas bien les estimer, on passe du risqué à l’incertain que l’on ne sait pas calculer.
Les normes en matière de capital devraient être plus débattues, il ne fallait pas de capital pour détenir des dettes d’Etat, ce n’est plus vrai, il ne fallait pratiquement pas de capital pour détenir des crédits aux collectivités locales, ce n’est plus vrai. N’est ce pas une erreur e lier aussi fortement les pertes statistiques et le besoin en fonds propres et e faudrait-il pas inclure une dose de choix sociaux. Est-on sur que le risque inattendu de perte sur un crédit PME est bien de 2 à 3 fois plus élevé que celui qui existe sur une grande entreprise, ne peut-on pas penser que cela puisse être l’inverse ?
La réforme de Bâle 3 en cours en Europe qui est l’adoption de la CRD 4 ferait bien d’en tenir compte.
Jean-Baptiste Bellon, Les banques et le financement des PME, une vidéo Xerfi Canal.
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