Qui va gagner la course aux implants cérébraux ? Gare au transhumanisme

En 2004, Larry Page, le fondateur de la start up Google, disait à un journaliste de Wired : « Un jour, Google sera inclus dans le cerveau des gens. Vous aurez un implant, et quand vous penserez à quelque chose que vous ne savez pas, il vous donnera automatiquement la réponse. » Cela paraissait de la science-fiction. Vingt ans après, c’est quasiment la réalité. Sauf que ce n’est peut-être pas Google qui va gagner la course aux implants cérébraux mais Elon Musk, Bill Gates ou Jeff Bezos.

D’abord, il faut savoir que les implants cérébraux, que l’on appelle aussi des puces électroniques cervicales, ne sont pas une nouveauté. Dans les années 60, un certain Jose Delgado avait été capable de maîtriser les mouvements d’un taureau équipé d’un implant en lui envoyant des stimulations électriques dans le cerveau. Delgado avait montré que de tels implants pouvaient contrôler la motricité (il avait par exemple obligé un chat à fermer un œil ou à bouger une patte), mais aussi faire naître artificiellement des émotions, comme l’euphorie ou la convoitise.

D’autres chercheurs, dans les années 2000, ont pu décoder les signaux venant d'électrodes implantées dans le thalamus d'un chat afin de reconstituer ce qu’il voyait. En 2004, Matthew Naggle a pu, par la pensée, contrôler un curseur de souris, changer de chaîne de télévision, mais aussi lire ses e-mails et actionner une prothèse de main robotisée.

Ce n’est donc pas nouveau scientifiquement. Ce qui est nouveau, c’est que quelques milliardaires sont en train de passer à l’exploitation commerciale. Elon Musk, avec sa filiale spécialisée Neuralink, a d’abord procédé à des expériences contestées sur des porcs et des singes ; mais en février 2024, il a implanté une puce cérébrale baptisée Tepathy sur un humain. Bill Gates et Jeff Bezos soutiennent une autre entreprise, Synchron, qui a posé dès 2021 des implants sur une dizaine de personnes atteintes de la maladie de Charcot. Synchron fait entrer les prothèses via la veine jugulaire, sans ouvrir le crâne, comme pour la pose d’un stent. Depuis qu’ils ont été opérés, deux de ses patients ont pu se servir de messageries et surfer en ligne, sans les mains ni la voix, en cliquant par la pensée. C’est lent, c’est laborieux, mais ils ont retrouvé un début d’autonomie.

Pour obtenir les autorisations officielles, les géants de la tech n’ont évoqué que les utilisations strictement médicales : redonner de la motricité à des personnes tétraplégiques, permettre à des personnes non-voyantes de retrouver en partie la vue. Mais on sait ce qu’il est possible de faire avec ces implants : donner de la capacité de mémoire supplémentaire, traduire en simultané (on vous parle en chinois, vous entendez en français), ou calculer à la vitesse de la lumière… En réalité, tout ce qu’on peut faire avec un ordinateur habituellement placé à l’extérieur de votre tête. Quand cela se passe à l’intérieur, l’interface cerveau-machine, c’est l’homme augmenté, le transhumanisme.

par une personne extérieure ou une intelligence artificielle nocive. Quel que soit celui qui gagnera cette course au contrôle de l’ordinateur par la pensée, il faudra qu’il nous explique comment il empêchera le pire d’arriver - le contrôle de la pensée par l’ordinateur.