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Parler aujourd’hui de satisfaction client, de qualité de service ou de rapport qualité / prix semble à la fois terriblement actuel et terriblement daté ! Aucune entreprise, aucune organisation publique ou privée, ne peut effectivement éviter de s’interroger sur ce qu’elle produit pour ses clients, utilisateurs et usagers et sur ce que ces derniers perçoivent réellement. En même temps, il pourrait sembler anachronique de détailler ces questions alors que nous avons bien entamé le 21ème siècle et que la réflexion marketing a bien changé depuis les années 80, décennie où les principaux travaux sur la qualité, la satisfaction et la valeur ont été publiés. Trois principales raisons nous conduisent à faire ce constat :


D’abord, l’objet du marketing a largement changé : il est de moins en moins question de matières premières brutes (farine, pétrole, bois, charbon, produits agricoles...), de biens et produits manufacturés ou même de services. A l’instar de ce qu’évoquaient Pine et Gilmore dans leur ouvrage à succès en 1999, nous sommes entrés dans une économie de l’expérience. Tout n’est qu’expérience ! Aller au cinéma, regarder la télévision, utiliser son ordinateur, déguster un café, se soigner à  l’hôpital, aller faire ses courses, prendre des vacances, cuisiner des petits plats, conduire une voiture, regarder une vidéo en ligne, regarder une vidéo sur Xerfi, etc. L’enjeu n’est donc plus de « designer », « marketer » ou vendre un objet, un produit ou un service. L’ambition est produire et de faire vivre une expérience à des sujets, des consommateurs, des partenaires, des fournisseurs, des salariés, etc. Ainsi que l’affirmaient Pine et Gilmore dans la HBR en 1998 (p 98), « les matières premières sont fongibles, les biens tangibles, les services intangibles, et les expériences mémorables ». L’expérience, plus que le produit ou le service, est vue comme un facteur de différenciation et de succès. Près de 40 ans après l’article séminal et célébrissime de Holbrook et Hisrchmann dans la revue Journal of Consumer Research, en 1982, le vocabulaire expérientiel a amplement et définitivement intégré les discours des managers. Il n’est plus désormais question que de marketing expérientiel et sensoriel, d’expérience client, de « shopping experience », d’expérience utilisateur (UX), d’émotions, de symbolique, d’esthétique et d’imaginaire, etc. La pensée en marketing s’est ainsi progressivement éloignée de l’objet et de ses caractéristiques (les attributs du produit) pour mieux se concentrer et se focaliser sur le sujet de l’expérience et sur la « tranche de vie » que constitue une expérience d’achat, de consommation et de possession pour l’individu. Par exemple, sur son site internet, l’enseigne « Relais et Châteaux » propose non pas des services d’hôtellerie de luxe et de restauration gastronomique mais des expériences : au pied des pistes, au soleil, city break, cours de cuisine, en famille, golf, into the wild, lune de Miel, Œnologie, safari et vie sauvage, spa et beauté ou encore week-end romantique. L’expérience « into the wild » renvoie alors à « des moments où l’on rêve d’isolement, où la solitude fait un bien fou... à des moments où le calme est nécessaire, où la nature nous ressource de ses bienfaits, où le plongeon dans l’immensité du monde nous renvoie à nous et à ce que nous sommes ». Ces expériences sont proposées sur les côtes escarpées de la Colombie britannique, dans les vastes territoires de la Patagonie, dans les Highlands écossais ou au sein de la chaîne de l’Himalaya. Il n’est donc plus simplement question de qualité de service, de satisfaction client ou d’un simple rapport qualité / prix. Nous sommes ici passés d’une logique de service à une logique d’expérience, d’une perspective de production à une perspective de consommation.


Ensuite, la qualité, la satisfaction et la valeur ne constituent pas des fins en soi. Ce ne sont que des moyens, parmi d’autres, de favoriser la rétention des clients actuels et de faciliter l’acquisition de nouveaux clients au travers du bouche à oreille qui en résulte.  La recherche tend en particulier à montrer que satisfaire des clients, leur apporter de la qualité et leur procurer un bon rapport qualité / prix constituent des conditions nécessaires mais non suffisantes à leur fidélité à la marque. Par exemple, de nombreux clients satisfaits sont infidèles et se comportent comme des chasseurs de prix et de bonnes affaires. A l’inverse, de nombreux clients insatisfaits sont fidèles pour de multiples raisons : soit ils font preuve d’une grande inertie et comparent rarement les offres, soit ils perçoivent des coûts de changement financiers ou non financiers (des efforts et risques à prendre en cas de changement), soit ils ne disposent pas d’alternative comparable ou supérieure au fournisseur habituel. La relation entre satisfaction et fidélité est donc bien plus complexe qu’il n’y paraît, celle-ci étant généralement de nature non linéaire. Dans les secteurs régulés (banques, assurances, transports, etc.), cette relation est concave : la théorie des rendements décroissants de la satisfaction montre qu’au-delà d’un certain seuil de satisfaction, les effets marginaux sur la fidélité déclinent. Il est donc coûteux et inefficient de « sur-satisfaire » les clients dans ces contextes. A l’inverse, dans les secteurs compétitifs, la relation est convexe : la théorie sur le ré-enchantement du client souligne que la fidélité est élevée seulement lorsque le client atteint de très hauts niveaux de satisfaction, une forme d’enchantement ou de « delight », alors que la simple satisfaction des besoins et désirs a peu d’incidence sur les comportements. Pour simplifier, on peut dire qu’il est tout à fait normal de satisfaire des clients, de leur apporter de la qualité et de leur procurer un bon rapport qualité / prix. Pour se distinguer et réussir, l’entreprise doit aller bien au-delà de ce que les acteurs du secteur proposent déjà et de ce que les clients attendent. Il s’agit de produire des expériences qui la sortiront des offres banalisées du secteur. Ainsi que le disait Georges Simenon, « les événements mémorables ne ressemblent jamais à ce qu'on attend d'eux. ». Délivrer des biens et des services satisfaisants, de qualité et de valeur aux clients est une condition d’existence et de survie sur un marché. Mais ce qui génère une trace affective, qui distingue durablement une marque ou une enseigne et laisse une empreinte mémorable chez les clients, c’est l’expérience au sens large avec son lot d’émotions, de surprises, de symboles et d’utilités. 


Enfin, un troisième mouvement tend à remettre en cause la manière dont le marketing est pratiqué. Le consommateur, le client, l’utilisateur ne peut plus être vu comme un être passif et réactif qui se limitera à apprécier, évaluer, juger puis choisir un produit ou un service. Il est de plus en plus vu comme un coproducteur, un co-créateur, un co-innovateur, un co-promoteur, c’est-à-dire comme un partenaire qui dispose de multiples ressources physiques, intellectuelles, notionnelles et communicationnelles. Il peut alors s’engager et mobiliser son énergie, ses compétences et sa créativité au profit de l’entreprise. L’approche SDL (service dominant logic), développée et popularisée par Vargo et Lusch (Journal of Marketing en 2004), trace ainsi la voie d’une double mutation. D’une part, nous assistons à une formidable « servicisation » des économies développées: en France, les services représentent plus de 80% du PIB et les marges opérationnelles de nombreuses entreprises industrielles reposent majoritairement sur leurs activités de service. Les constructeurs automobiles PSA ou Renault bénéficient par exemple de la commercialisation de crédits auto, de la revente de pièces détachées, des révisions et réparations régulières, etc. D’autre part, la valeur ne réside pas dans l’objet qui est acquis (bien ou service) mais dans l’usage que l’on en fait. Par exemple, de nombreux appareils électroménagers disposent d’une multitude de fonctionnalités qui ne sont jamais exploitées par les acheteurs et qui n’en perçoivent donc pas la valeur réelle. L’usage d’un bien, l’accès à un service ou l’utilisation d’une technologie nécessitent ainsi forcément l’intervention et la participation du client. Plus encore, cela requiert une forme d’appropriation des biens et services dont il est question. Par exemple, les français téléchargent de nombreuses applications sur leurs smartphones mais n’en utilisent qu’une minorité (5 sur 28 installées selon Médiamétrie) et abandonnent immédiatement ou progressivement les autres après quelques utilisations. Cela peut être lié à des défauts d’utilité et de praticité pour les utilisateurs, mais cela montre aussi une difficulté de nombreux utilisateurs à s’approprier ces outils, à en prendre véritablement possession et à les incorporer dans leur vie quotidienne. A l’inverse, les applications qui réussissent, comme Snapchat, Waze ou Uber, ont su franchir les différentes étapes de l’appropriation et accentué la valeur dans l’usage de leur technologie. Une entreprise qui fait une proposition de valeur sur un marché à des clients n’a donc parcouru qu’une partie du chemin. Reste à penser l’offre en termes d’appropriation de cette valeur par les clients et à mettre en place des mécanismes qui faciliteront l’extraction de cette valeur par les utilisateurs finaux. Cela suppose notamment de rendre le bien ou service appropriable en laissant l’opportunité à l’utilisateur de le détourner à son image, à ses besoins et à son profit.


En définitive, l’expérience est devenue en quelques années le maître-mot de la pensée marketing. L’expérience est à la fois vue comme un facteur de différenciation plus puissant que ne le sont la qualité des produits et la satisfaction client. L’expérience constitue également le socle de la relation client, de la confiance et de l’engagement client, ce qui conduit aujourd’hui nombre d’organisations à repenser les parcours d’achat et la consommation de leurs produits. L’expérience est enfin le fruit d’une co-création où, d’une certaine manière, « l’entreprise propose et le client dispose ». C’est le signe d’organisations qui sont davantage centrées sur leurs clients et pas seulement sur leurs produits. De là à dire que le client a pris le pouvoir sur le marché, il y a un pas que certains franchissent mais qui suscite chez moi un certain scepticisme. Le pilotage de l’expérience ouvre aussi la voie à de nouvelles formes de manipulation et d’influence.


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