Les alpinistes sont des lanceurs d'alerte écologique

Le changement climatique continue à s’accélérer parce que les émissions globales des gaz à effet de serre, qui en sont la cause physique continuent à croître. Et ce malgré toutes les alertes scientifiques et les nombreux dérèglements environnementaux de plus en plus fréquents (méga-feux, canicules, cyclones plus fréquents et plus violents, …). Dans le même temps, la biodiversité se réduit et sur les 9 limites planétaires, 6 sont déjà dépassées.

Ce contexte interroge toutes les pratiques (modes de transport, alimentation, agriculture, production industrielle, loisirs, …).
Ce changement climatique est particulièrement visible en montagne : fonte accélérée des glaciers, éboulements fréquents, crues soudaines comme celle qui a détruit La Bérarde en France en juillet 2024, enneigement plus aléatoire. Les territoires de montagne se réchauffent deux fois plus vite que les autres écosystèmes.

Dans les Alpes et les Pyrénées françaises, la température a augmenté de 2°C au 20e siècle, contre 1,7°C pour le reste du pays.
Ce qui donne aux alpinistes une responsabilité de « lanceurs d’alerte » parce qu’ils sont aux premières loges pour constater la rapidité et l’ampleur de ces transformations. La montagne étant le milieu où elles sont parfaitement visibles sur une échelle de temps très courte.

La montagne elle-même nous avertit mais ce n’est clairement pas suffisant pour susciter une réaction collective à la hauteur. Les alpinistes, peuvent servir d’accélérateur à cette prise de conscience nécessaire en témoignant de ce qu’ils vivent dans leur pratique depuis déjà des années à bas bruit. Il serait temps que ce bruit s’amplifie.

C’est l’organisation économique du monde par le capitalisme qui s’étend de plus en plus sous la nécessité que lui impose l’accumulation ininterrompue du capital, au prix de la destruction de la nature et des humains qui est la cause première de la trajectoire mortifère que nous sommes en train de suivre. La finitude n’existe pas pour le capital et quand il la prend en compte c’est pour continuer son accumulation. C’est, par exemple, ce que montre le cas de la mer de glace à Chamonix, dont le recul spectaculaire sert d’argument publicitaire pour inciter les touristes à venir la voir avant qu’elle ne disparaisse complètement.
C’est pourquoi les montagnards peuvent témoigner de cette urgence d’agir en communicant sur la dégradation des conditions en montagne qu’ils constatent en spectateurs inquiets. Ici, ce n’est pas en tant que pratiquants s’interrogeant sur leurs pratiques qu’ils peuvent agir (action qui reste nécessaire mais largement insuffisante), mais en tant que citoyens témoignant pour tous de l’ampleur et de la rapidité des transformations que notre mode de production fait subir à notre écosystème naturel. Et ce témoignage ne doit pas en rester au simple constat des transformations de la montagne (disparition des glaciers de plus en plus rapide, chutes de pierres fréquentes, disparition de pans entiers de montagnes, diminution de l’enneigement, …) mais doit aussi faire le lien avec l’organisation économique du monde.

Car ce n’est qu’en prenant conscience de ce lien qui est la causalité réelle des émissions de gaz à effet de serre qu’on peut espérer changer de trajectoire.