Xerfi Canal présente l'analyse de Thibault Lieurade, journaliste Xerfi Canal
Les Français dépensent moins, les Français dépensent autrement. C'est la conséquence directe d'un pouvoir d'achat durablement attaqué, coincé entre modération salariale persistante et pression fiscale accrue. Il ne faut d'ailleurs pas s'attendre à autre chose qu'à une nouvelle baisse en 2014, la 3è consécutive et la 4è en 7 ans. Une baisse de 0,9% par unité de consommation, c'est-à-dire en tenant compte à la fois de la composition des ménages et de l'évolution démographique.
Il ne faut pas se faire d'illusion : les Français ne puiseront pas dans leur épargne pour dépenser plus, ce qui plongera la consommation dans une zone dépressionnaire alors qu'elle évoluait sur un rythme encore proche de 2% au milieu des années 2000. Et encore, ce surplace doit pour beaucoup au gonflement des dépenses contraintes, celles qui s'imposent aux ménages et qui réduit d'autant l'espace réservé aux autres achats. Résultat : les ménages arbitrent, chassent le superflu pour se concentrer sur l'essentiel. Un 1er type d'arbitrage déjà perceptible dans l'évolution du chiffre d'affaires de nombreux commerçants : c'est le cas des bijoutiers - horlogers. Au rythme de la descente actuelle, la profession se dirige droit vers une chute supérieure à 7% de son activité cette année, signe que le marché du luxe souffre aussi.
C'est aussi la bérézina chez les spécialistes de l'habillement en recul de 6,4%. Quant aux magasins de sports (-5,8%) et les maroquiniers (-4,7%), ils ne s'en sortent pas non plus. Coté loisirs, ce n'est pas mieux. Les parcs d'attraction ne font pas le plein et se dirigent vers une sévère glissade de leur activité de 6,1%. Les restaurants n'affichent pas complet non plus et la note s'allège. Bilan, les recettes plongent. Dans les instituts de beauté, dans les salles de cinéma, baisse de fréquentation rime aussi avec chiffre d'affaires en berne (respectivement de -1,8 et de -0,6%). Pour dépenser moins, quoi de plus facile aussi que de choisir les enseignes low cost. C'est le second type d'arbitrage, celui du choix du circuit de distribution. Et c'est un fait, le low cost envahit désormais tous les segments de la consommation. Aux secteurs emblématiques du transport aérien et du hard discount alimentaire sont progressivement venus s'ajouter le mobilier, l'automobile, l'habillement, la banque, l'assurance, et depuis peu l'immobilier, la coiffure et la restauration. C'est une manière de rationaliser ses choix en se recentrant sur les seuls prix des produits ou des services.
A coté de ces ajustements traditionnels s'ajoutent des changements profonds de comportement. C'est le développement du troc, des achats groupés ou du marché de l'occasion.
Alors bien sûr, la pression sur le pouvoir d'achat est passée par là. Mais ces marchés profitent aussi du renforcement des aspirations écologiques et citoyennes. D'ailleurs, le portrait-robot du consommateur de biens d'occasion est une personne plutôt diplômée, de 25 à 45 ans, et qui gagne plus de 3 000 euros nets par mois. Donc, plutôt à l'abri des difficultés économiques.
De fait, l'achat d'un bien d'occasion est devenu un acte engagé. Ce glissement implique aussi une manière différente de concevoir le cycle de vie d'un produit. Au lieu que celui-ci soit linéaire - achat ? usage ? poubelle -, celui-ci devient pluri-usages. ? achat ? usage ? revente ? nouvel usage, etc? C'est la consommation collaborative, on passe du « je » au « nous » et de la propriété à l'usage.
Une révolution rendue possible grâce à Internet, au foisonnement d'initiatives puis à la structuration d'une offre capable de capter la valeur créée par les différentes pratiques de cette consommation collaborative. Devenu des géants du web, Ebay et leboncoin sont emblématiques de ces transformations. La crise a été le révélateur de nouvelles formes de consommation, la reprise ne fera que les confirmer.
Thibault Lieurade, Les consommateurs face à la baisse du pouvoir d'achat : arbitrages et nouveaux comportements, une vidéo Xerfi Canal
Publié le lundi 28 octobre 2013 . 4 min. 36
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