Les marketeurs nous parlent souvent de polysensoriel ou d’expérience mais assez peu d’atmosphère. On sait depuis longtemps que le tempo de la musique, la nature des odeurs diffusées, le choix des matériaux et de la lumière ont un rôle décisif dans la scénarisation d’une expérience de consommation et dans l’expérience que l'on peut faire d'un point de vente. Ces différentes formes de résonances ont été analysées, mesurées et exploitées à foison.
Mais qu’en est-il de l’ambiance ? Et pourquoi faut-il la distinguer de celle d’expérience ? Un philosophe a eu l’audace de se pencher sur cette question pour notre plus grand bonheur. L’ambiance fait partie de ces phénomènes invisibles qui nous enveloppent sans que nous les réfléchissions. Ce qui semble être une notion plutôt vague et flou renvoie à ce qui nous entoure et nous affecte et qui possède une certaine tonalité, un caractère, une expressivité qui nous touche. C’est une sorte de "dôme invisible sous lequel se déroulent toutes nos expériences".
L’ambiance fait donc partie de notre vie affective dont on sait l’importance capitale qu’elle jour dans notre existence. Mais l’affectivité que recouvre l’ambiance est particulière. Elle n’est pas purement organique comme le serait par exemple le sentiment de bien-être parcourant notre corps. Ce qui rend l’ambiance fascinant est le fait qu’elle nous permet de toucher et de recevoir ce fond commun de l’existence, comme si le milieu est en nous autant que nous sommess en lui. C’est pourquoi comme le montre très bien Bruce Bégout, "l’ambiance nous permet de dépasser la division du moi et du monde, de retisser le lien entre l’homme et son environnement".
Se pose alors la question de savoir s’il est possible de créer des ambiances ou de faire de nous des ambianceurs. Car tel n’est-il pas l’un des objectifs du design d’environnement de la scénographie marchande et de toutes les stratégies de divertissement marchandes ? Quelle marque n’essaie pas en effet de modifier notre environnement pour produire des tonalités affectives ?
Or il y a toujours une dimension qui échappe dans l’ambiance, « une alchimie, souvent collective, que le sujet ne peut pas contrôler à sa guise ». Car « malgré tous les dispositifs dont nous nous entourons, les ambiances ne sont pas à notre disposition. Ce sont elles plutôt qui disposent de nous, qui nous décentrent et nous enveloppent ». Telle est bien la force de l’atmosphère et la raison pour laquelle nous devrions nous en préoccuper davantage.
Bruce Bégout, Le concept d’ambiance, Seuil, 2020.
Publié le jeudi 10 juin 2021 . 2 min. 49
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