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Les managers et l'obsession de la vie intense

Publié le jeudi 17 septembre 2020 . 4 min. 03

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Qu’il s’agisse de publicités pour les vacances, pour le café ou pour un écran de télévision la promesse est toujours plus ou moins la même : l’intensité. Intensité de l’expérience, intensité des saveurs, intensité des couleurs. Rien ne promet jamais autant qu’elle. Cette promesse constitue une valeur dans le monde moderne car elle répond à l’exigence capitale de la performance, alors même que son principe donne l’impression d’échapper à toute mesure. L’intensité c’est la quantité maximale qui permet d’échapper à la vie banale, celle où règne les petits calculs de la vie bourgeoise, de la vie à amplitude existentielle faible.


C’est à partir de ce postulat que l’écrivain et philosophe Tristan Garcia titre l’un de ses essais La vie intense. La valeur d’intensité, devenue nous dit-il « l’ethos de notre humanité » (p. 25) coïncide plus que nulle autre avec les croyances d’aujourd’hui : non pas centrées vers un possible après mais vers l’ici et maintenant, vécu toujours plus intensément, promptement, incessamment. Au point que les différences qui s’expriment entre « libéraux, hédonistes, révolutionnaires (ou) fondamentalistes ne s’opposent peut-être que sur le sens de cette intensité dont notre existence a besoin » (p. 17) raconte Garcia. Car le souci d’intensifier le hic et nunc ils l’ont tous en commun.


Mais il constate aussi qu’hélas les sensations fortes et répétées de cette forme de vie, qui n’a fait que prendre de plus en plus d’importance depuis l’invention de l’électricité au XVIIIème siècle, rend dépendant, épuise et brûle. Si l’intensité est bonne en soi, dans la vie professionnelle ou personnelle, elle ne peut constituer un idéal absolu.


Thomas de Quincey que cite l’auteur, qui écrivit Confessions d’un mangeur d’opium anglais, expliquait en effet que « tout organisme […] qui a reçu pendant quelque temps de la morphine éprouve le besoin d’en recevoir à doses croissantes : c’est un besoin somatique […] Il n’est pas un homme, (…) quelque bien trempé qu’il soit, quelque lettré, quelque énergie qu’il soit, qui puisse faire une exception à cette règle ». En d’autres termes, la vie intense, et sans temps mort, est assujettie à une amplification hyperbolique qui prédit dans le même temps son insatisfaction à venir, son auto-dégradation, sa contradiction en acte.


Face à la montée en flèche du burn-out des cadres, cette analyse a de quoi faire réfléchir. Les agendas qu’ils s’imposent où il s’agit à chaque moment de la journée de maximiser toutes leurs expériences vécues, augmentent le risque d’épuisement physique et psychologique. La question que les managers doivent se poser est la suivante : comment maintenir une vie excitante sans programmer au même instant, à force d’augmenter les sollicitations, les cadences et les stimuli, son effritement, son épuisement ?


Dans le même temps, il faut bien admettre que si les entrepreneurs ou les managers s’imposent un tel rythme de vie, c’est parce qu’il leur permet tout simplement d’échapper à la platitude, à la fadeur et à l’ennui. La période de crise sanitaire nous a permis de mieux nous en rendre compte : des agendas moins remplis, des relations humaines moins nombreuses, des expériences moins diversifiées et moins fortes, la désintensification de notre emploi du temps a-t-elle apporté le lot de satisfactions immédiates que nous en attendions peut-être ? Réponse : pas vraiment. Tout se passant comme si nous étions finalement accros au désir d’intensité plus nous le pensions nous-mêmes.


Dès lors comment se réconcilier avec le sens de la mesure et une certaine sagesse alors même que la modernité a tout fait pour nous en séparer ? Car « deux précipices bordent le chemin d’une existence » indique Garcia dans les meilleures pages du livre, «  qui sont, d’une part, la tentation de penser sur le modèle de ce que nous vivons (c’est le désir de l’homme intense) et, d’autre part, la tentation de vivre sur le modèle de nos pensées (c’est l’espérance des sages et des hommes de foi) » (p. 268-269). Face à cette tension, il en appelle finalement à une forme de double résilience qui peut être une leçon de savoir-être pour les managers aux vies traversées par le « toujours plus »: faire toute la place à leur « électricité intérieure » (p. 274) tout en s’efforçant de veiller, avec la même intensité, sur la santé durable de leur système nerveux.


D'APRÈS LE LIVRE :

La vie intense : Une obsession moderne

La vie intense : Une obsession moderne

Auteur : Tristan Garcia
Date de parution : 27/04/2016
Éditeur : Autrement
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